Histoire :
Les Origines de Charme Liesplin se perdent avec l’Eclipse et les affres du temps. Sa taille improbable reste un mystère pour ceux qui l’ont côtoyés, qu’ils soient érudits, saisonins ou simples marins d’eau douce. Certains avancent que son physique prendrait racine dans le Décan contre nature de l’Automne. Peut être… Ce qui est sûr, c’est que le sang de la Fée Noire n’est pas entièrement consacré à l’Hiver, et que la rousse saison lui a imposé sa marque.
Comme toutes les Fées Noires, Charme est soumise à l’Appel. Digne fin préservant sa race des perfides. On ne sait qui elle fut avant d’entamer sa vie maritime. Les seuls vestiges de son ancienne vie furent une grotte et un trésor. En effet, la Fée Noire fut retrouvée dans un tombeau, au creux d’une crique brumeuse et secrète d’une île perdue au large de l’Enclave Boucanière. Son éveil et son destin furent tracés par les rêves voraces d’un homme.
Brant Taillebrise était un Capitaine Pirate banal. Comme tous, il vivait pour la mer et ses rêves de liberté. Sa soif de trésor animait sa vie et celle de son équipage, une bande de filous dégourdis. Alors qu’il n’avait pas les épaules de son ambition, la chance sembla lui sourire. Par un pâle après midi d’hiver, quand les eaux se transforment en brume épaisse pour accueillir le crépuscule, son navire tomba presque par hasard sur un îlot dégarnit. Accostant la seule plage du récif, histoire d’y passer la nuit, l’équipe d’éclaireurs rapporta la présence d’une cavité dans les hauteurs, avec une sorte d’escalier vétuste y menant. Taillebrise, torche au poing, organisa l’expédition. Quelle ne fut pas sa surprise en tombant sur un magnifique trésor gardé précieusement dans une grotte emménagée ! Bijoux de pierres précieuses. Pièces d’ors et d’argents. Miroirs décorés et œuvres d’art. Il y avait là de quoi contenter une bonne année de rapines. Poursuivant plus avant son exploration, Taillebrise tomba sur le tombeau de verre d’une Fée Noire endormie. A cette vision, une vieille comptine lui revint en mémoire. Une chanson sur les Fées Noires et leur faculté à pondre des Ames. Comment un ancien Capitaine légendaire avait fait naître sa figure de proue pour dompter les océans. Il ne savait plus très bien si l’histoire concernait Rigello ou non, toujours est-il qu’il s’en inspira. Lui aussi aurait un navire animé de vie.
Est-ce le pillage ou les émotions de Taillebrise qui déclencha l’Eveil ? Nul ne sait, l’alchimie est trop complexe. A peine son tombeau fut ouvert que la Fée Noire reprit vie. Perdue, sans aucune trace de souvenir, elle paraissait bien fragile et naïve. L’équipage, des humains pour la plupart, n’ayant que peu d’expérience envers ce décan ne remarqua pas à quel point celle-ci était grande pour son peuple. Brant Taillebrise l’accueillit avec une tendresse malsaine. Elle allait le servir, puis mourir. Voila ce qu’il pensait.
Enfanter une âme n’est pas chose aisée. Taillebrise se fourrait le doigt dans l’œil s’il pensait que ce serait rapide. Il baptisa son hôte Charme, pour l’attrait que son pouvoir exerçait sur lui et l’horizon des possibles qu’elle ouvrait. La Fée fraîchement éveillé ne connaissait rien de l’Harmonde et de l’accouchement. Elle posa de nombreuses questions à son Capitaine qui finit par se lasser de lui répondre. Il prit son mal en patience. Jamais il ne douta de son objectif, la providence avait mis cette fée noire sur son chemin. Charme apprit la vie sur le tas, entourée de marins roublards et des vagues incertaines. L’Eveil était difficile, mais elle révéla une santé de fer. Elle endura plusieurs années sa condition. Les divers escales étaient pour elle sujet d’émerveillement. Le moindre détail attisait sa curiosité.
Petit à petit, elle tissait un lien avec le bois du navire. Elle appréciait ce contact rugueux des poutres pétrifiées par le sel, polies par les vents. C’était presque un réflexe, un enseignement inné. Elle communiquait avec ce bois chargé d’histoires, d’expérience. Elle ressentait ses émotions et ses regrets. Par envie, elle se mit en tête de répondre aux exigences de son capitaine : Enfanter une figure de proue. C’était une manière pour elle de retrouver ses racines.
En parallèle de ses recherches, l’équipage menait son train-train quotidien. Bagarre. Rhum. Meurtre. Désastre. Pillage. Vol. Bataille. Sang. Elle assistait à cette déchéance humaine et sa mémoire s’en nourrissait. Certaines scènes la choquèrent, le viol d’une femme enceinte dans un faubourg de Tortage ; les pleurs d’un enfant face à son père fraîchement crucifié, les marées de sang que traînait le navire après une longue bataille. Amputation. Gangrène. Scorbut. Les navires gelés du septentrion, aux équipages figés dans la mort. Elle sentit le froid angoissant et la moiteur des forêts modéhennes. Pour ne pas succomber, elle devait devenir aussi dure que son milieu. Implacable et indomptée. Comme tous, il lui fallait un défouloir. Elle se mit à participer aux batailles, s’occupant généralement des jeunots ou des ratiers. Sans le nier, elle y trouvait un certain plaisir. Ce penchant pour le combat suffit à lui faire une réputation au sein de l’équipage et dans quelques Tavernes. Elle était la Vioque, la Vieille Chienne, l’Hargneuse aux longues rides.
Il est une anecdote importante à relatée pendant ces années de recherches. Un jour d’été aux abords d’un port Keshite, un nain vint demander asile au Capitaine Brant Taillebrise. Il s’appelait Algahim Thor, et exerçait la profession de charpentier. Il avait eu quelques problèmes avec l’Equerre, ainsi, il cherchait à fuir leur courroux. Ne voulant pas avoir des ennuies avec cette illustre corporation, Taillebrise refusa d’abord. Pourtant, Charme plaida en sa faveur, argumentant que le nain avait du être formé au sein de l’Equerre et qu’un tel savoir faire ne saurait être rejeté. Ce qui l’avait frappé en fait était la couleur de ses cheveux : mèches rousses. Dans ces mèches, elle trouvait un attrait particulier, dicté par les tréfonds de son âme. La Fée étant de conseils avisés, Taillebrise revit son jugement et accepta le nain au sein de son équipage. Ce dernier en fut éternellement reconnaissant à Charme. Elle gagnait ainsi son premier ami.
Algahim sut gagner le respect des marins. Peut être par reconnaissance pour Charme, il réussit à récupérer grâce au jeu une pièce maîtresse du trésor de l’ancienne vie de Charme. En effet, l’un des hommes en avait gardé un livre, ou plutôt, un journal intime… Des pages avaient été arrachées par les tourments de la mer (et pour servir de PQ aussi pour la petite histoire), mais il restait une partie du récit.
En lisant ce journal, il se passa quelque chose de fabuleux, ou de terrifiant. Charme retrouva une partie de sa mémoire. Dans une explosion de souvenirs et de savoir faire, elle se réappropria les secrets de la Cyse dont elle était maîtresse. Elle connaissait enfin son nom précédent : Liesplin, avec lui, les images de ses actions passées. Il restait encore beaucoup de zones d’ombres, mais ce flot jaillissant accentua encore sa vitalité. Elle se sentait maintenant prête pour l’accouchement et pour la suite de son plan.
Avant d’accoucher, elle retailla la Figure de proue à son goût. Elle en garda les traits masculins mais lui fit un air plus torturé. De son épaule droite partait une bosse qui déformait sa silhouette. Cette difformité contrastait avec son sourire enfantin souligné par une barbiche broussailleuse et fourchue.
Elle accoucha un soir de pleine lune. Les rayons de l’astre illuminaient le pont humide. Il régnait un silence solennel, seulement brisé par le sifflement du vent dans les voiles. La majorité de l’équipage était réunit sur le gaillard d’avant pour assister à la scène. Charme se concentrait. Elle savait ce qu’elle faisait. Elle connaissait ses gestes. Un rythme lancinant l’entraînait dans sa tâche. Les mains sur son œuvre, elle se laissa transportée par la transe. Un caractère se tissait sous ses doigts. Fidèle. Braillard. Espiègle.
Peu à peu, le Bossue prenait vie. Le bois prenait une autre couleur. Il se faisait plus vif, plus brillant. Il se teintait presque d’or, comme huilé. Sa peau s’éveillait en reflets ambrés. Vivant, sa bouche forma un cri guttural qui fit tanguer le bateau. Etrange alchimie entre la matière et le vivant, l’être respirait sans que sa cage thoracique ne se soulève. Il était un hybride, aux yeux respirant l’intelligence.
Brant Taillebrise jubilait. Son rêve devenait réalité. La providence lui accordait ce qui lui était dû. Il avait tant patienté. Il se précipita vers le Bossu, l’accueillant avec joie dans son équipage. Il ne cessait de tarir d’éloge envers la création quand sa dernière idée lui traversa l’esprit : Plus besoin de cette enquiquineuse de Fée Noire. A peine se retourna-t-il, le sourire aux lèvres que Charme ordonna à son enfant de le saisir. « Grégoire, choppe moi ce fils de pieuvre ! » La figure de proue obéit avec prestance, empoignant l’homme par les deux bouts et le démembrant avec violence, vidant ses viscères dans l’eau sous les yeux médusés de l’équipage.
« Maintenant, c’est moi qui commande ! » clama-t-elle alors qu’Algahim la rejoignit avec une poignée de fidèles. Le remout menaçant du navire ne laissait aucun autre choix.
Voici comment Charme commença sa vie de Capitaine du Bossu. Et que la légende se façonna.
Dix années se sont écoulées depuis. Le nom de Charme, la Sombre Dame, s’est maintes fois entendu dans les ruelles confinées des ports de l’Harmonde. Le doute sur ses origines est encore permis. Nuls n’arrivent à se faire à l’idée qu’elle puisse être une Fée Noire. Ces êtres sont généralement maudits, mais rarement craints. On imagine mal ces grand-mère gâteuses cruelles et mener de rudes gaillards au combat. La piraterie n’est pas l’affaire des bouffons. Pour se voiler la face, nombreux la considère comme un démon cracher par les Abysses. Le genre de parasite qui oublie le chemin de retour. Charme laisse courir les racontars. Elle connaît l’importance des réputations, bonnes ou mauvaises, et sait les utiliser.
Ses rivages de prédilection parcourent la mer de l’Aurore vers la mer Scintillante, en s’attardant aux abords de la mer des Tristes (sans toutefois y accéder). Son navire croise la route des icebergs et des transports Janréniens. Son emblème est banni de tous les ports de ce pays maritime, elle cause bien trop de dégâts. En revanche, sa rudesse est appréciée dans les Parages. Charme ne s’interdit pas quelques excursions vers le modéhen mais ses vagues favorites resteront celles du Golfe d’Ebène et de la mer d’Orion.
Ces dix années ont vu son équipage évoluer, grandir, mourir, apprendre. Charme connaît les victoires et l’amère défaite. Même si elle est avide, elle ne se fait pas d’illusions sur ce que la vie lui réserve. Au mieux, elle s’endormira tranquillement dans ses quartiers, en plein mouillage du début de printemps. La mort la guette, un jour ou l’autre. Son existence oscille sur la planche aux requins. Dix ans, et déjà beaucoup d’expériences. Elle crame la vie comme si elle n’avait pas le temps devant elle. Peu après avoir prit le commandement, deux ans à peu près, elle connu la déchéance. Une mutinerie décima les trois quarts de son équipage. Elle en sortie blessée, physiquement et moralement. Elle prit une année sabbatique dans un petit port Paragéen, se consacrant à la Cyse et à son navire. Le Bossu devait panser ses propres blessures. Remise d’aplomb, elle embrassa de nouveau la Piraterie avec toujours plus de verve.
Elle organisa le pillage d’un navire Princéen en plein port de Sasmiyana, et cela sans se faire remarquer par les autorités. Cet épisode reste encore au travers de la gorge du Capitaine Emo Watari qui jure depuis de se venger. De cette aventure, elle garda un danseur en souvenir. Elle s’exerce au Supplice dessus de manière autodidacte et expérimentale.
Voila trois ans, elle fut contactée par une certaine Néïade qui lui promis monts et merveilles. Elle n’avait qu’à obéir à ses exigences qui relevaient plus du jeu de la compétition plutôt qu’autre chose. La Dame semblait puissante et mieux valait ne pas s’en faire une ennemie. Elle accepta et entra dans les rangs des Princes Pirates. En cadeau, Neïade lui offrit un astrolabe adapté à ses petites mains qui lui sert à la fois d’Amante Cardinale et de réceptacle aux âmes de navires. Charme changea son Pavillon pour un Diodon jaune sur fond bleu nuit.
Les horreurs que Charme vécue firent rapidement jaillir son Diablotin personnel, pourtant, elle ne se mit à la pratique de la conjuration que très tardivement. Algahim Thor, son compagnon nain, l’encouragea dans cette pratique. Il en connaissait lui-même quelques rudiments. Quitte à plonger, autant faire les choses comme il faut. Son culot familier l’animait.
Aux confins du Golfe d’Ebène, dans les brumes hivernales, elle se rendit sur l’île dîtes du Pendu. Elle avait acheté la carte à un vieil Advocatus Diaboli édenté de Sasmiyana. L’homme l’avait reçu dans sa mansarde glauque, peuplée de carcasses d’animaux. L’odeur lui restait encore en guise de supplément. Il avait rit, dévoilant ses dents éparses, lorsqu’elle exprimait sa requête. Son rire transportait d’abondants glaires. Il avait finit par lui vendre la carte, lui conseillant d’être prudente. Un propos presque ironique. Les prudents ne foulent pas l’île du Pendu.
La terre était d’un noir volcanique, pleine de crevasses et de crépis. Des crabes obscurs s’égosillaient dans de maigres flaques croupies. Le canot de Charme mordit la plage de galets charbons. Face à elle, des pierres informes toutes soudées les unes les autres égaillaient le mortuaire paysage. Un chemin de cendres menait au centre du Roc. Charme le prit, accompagnée par Algahim. Le reste des hommes surveillaient le canot. Ils arrivèrent sur une place circulaire, plate et sans débris. Au centre, un mat d’acier supportait un corps décomposé. Les membres mous se balançaient au gré du vent et de la pluie, accompagnés par les guenilles à demi rongée que l’homme portait. Une chaîne oxydée le maintenait en suspend. Charme ne pâlit même pas, et s’avança sans peur vers le damné. Plus près, on pouvait voir les noirs asticots se nourrir de sa chair flétrie.
Une unique paupière dénia s’ouvrir à l’approche de la Fée Noire. L’œil frappait par son caractère tellement humain, strié de sanglantes veinures. Une langue démesurée sortie de la bouche oblique du Pendu. Il s’humecta les lèvres avec soin.
« Qui trouble mon funeste repos ? » dit il dans un sifflement étranglé.
« Je suis Charme Liesplin, Sombre Dame et Princesse Pirate. »
« Que me vaux l’honneur de cette présence, princesse ? »
« J’aimerais m’entretenir avec ta maîtresse… »
A ces mots, le Pendu s’étouffa. Il toussa longuement, mi amusé, mi désappointé par cette demande.
« Tu ne sais pas à quoi t’attendre. Ma maîtresse ne souffre d’aucun rendez vous. Quiconque la croise trépasse, c’est aussi simple que ça. »
« J’ai fait mes propres recherches… J’ai un marché à lui proposer. »
« J’espère pour toi qu’il en vaux la chandelle. » Sur cette phrase, le ciel s’obscurcit. L’air se souleva, emportant de gros nuages menaçants. Plusieurs heures passèrent alors que le soir tombait. Charme était patiente. La tension des environs s’accentuait. Son hôte serait bientôt là.
Un éclair déchira la nuit. Le croissant de Lune rayonnait avec majesté, étirant les ombres.
Une explosion perçante jaillit de la mer, et une silhouette gigantesque encadra l’horizon. Femme d’obsidienne aux cheveux d’algues, son corps exhalait une beauté surnaturelle. De ses grands yeux jaillissaient des rayons de ténèbre lunaire. Silith, le Haut Diable des Mers se tenait droite face à elle. Charme ordonna à Algahim de retourner seul au canot, elle voulait parlementer avec la Diablesse face à face.
L’échange fut long, et dura jusqu’aux petit matin où Silith du partir. Toutes deux avaient eue ce qu’elles voulaient. Contre la pratique de la Conjuration Maritime, Charme dévoila l’un des précieux secret de sa mémoire : La connaissance d’une route fluviale vers la cité d’Albandisse. Charme participerait à la traque des démons de Vitrance.
C’est avec une soif nouvelle de savoir qu’elle se jeta dans la pratique de la Démonologie.
Qualités : Vive de corps et d’esprit. Juste. Perspicace. Joviale. Ambitieuse. Courageuse.
Défauts : Avide. Sadique. Obstinée / Têtue / Bornée. Cruelle. Parano. Joueuse.
Ce qu'elle aime : Les trésors et les trophées. La Torture. Son navire et son fils Grégoire. La mer et ses charmes. Surprendre. Jouer. Son Kriss. Son Danseur. La Connaissance.
Ce qu'elle déteste : Perdre ! Qu’on lui vole quelque chose. La mièvrerie. Rester inactive.
Dernière édition par SuperPampers le 19 Août 2008, 22:39, édité 1 fois.
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