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Le Val des Ténèbres V


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 Sujet du message: Le Val des Ténèbres V
MessagePublié: 25 Avr 2008, 00:39 
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Safran
Safran
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Localisation: Entre Vercors et Brocéliande
- Sais tu Hugorne, que je suis presque las de t’attendre tout ce temps !

La voix est frêle, presque cristalline, et pourtant elle se permet une invective que peu de gens se risqueraient à faire, à l’encontre de ce terrible guerrier.

- Si fait ma douce, j’ai fait mon possible pour aller au plus vite !

- Vois tu la lune, elle est ronde, ronde comme le ventre de celle que tu caches en tes sombres cachots !

- Quoi ? Mais de qui parlez vous donc ?

- De la putain de Valombre pardi, Ysane est enceinte, les astres me l’ont révélés. Mais elle ne le sait pas encore !

- Mais, mais, et qui est le père ?

- Ta mort crétin, celui qui te suit à travers les yeux rouges de ses louves blanches, celui que tu as laissé fuir, alors qu’il te fallait l’occire pour arriver à tes fins. J E H A N de Montfroide ! Tu ne seras toujours qu’un avorton, Hugorne de Mortcombe, n’allant jamais au bout de ce que tu entreprends. Ai je seulement bien fait de te choisir pour réaliser mes plans ?

- Si fait ma douce, je trouverai ce Jehan, et vous apporterez sa tête.

- Balivernes que tout cela Hugorne, mais il nous reste encore une chose à faire : A toi d’épouser cette Ysane, on dira que son fils est le tien, et tu auras enfin le pouvoir sur les terres d’Ardenceuil, et tu pourras honorer ta dette, et me donner les clés du passage, la plaie(*) de Tristevent !

- Il te faudra encore vaincre le vieux Rescal !

- Ne t’inquiètes pas, de lui j’en fais mon affaire, mais maintenant, écoutes moi et ne me déçois pas, ou tu subiras mon ire et celui de tous les Hauts diables qui croient en ce projet ! Nos légions sont prêtes et levées, il ne nous faut qu’un maudit portail pour envahir les Baronnies, alors ne te méprends pas, si tu échoues, tu n’existes plus !
ÉPOUSE CETTE YSANE !

A ces mots, si emplis de fiel, le sol trembla sous l’impact de cet ordre irrévocable.
Des milliers de corbeaux s’envolèrent soudain en criant des hautes branches sur lesquelles ils étaient perchés, faisant dégringoler la neige des cimes alourdies.
La lune se voila un instant, derrière un mince bras décharné, issu des nuées mortifères.
L’harmonde semblait jouer en cet instant son bien précaire destin, et le grand homme, lui même, avait perdu toute sa superbe et son arrogance naturelle n’était plus qu’un leurre bien faible devant Begrofen ij Morkraë, émissaire d’Acrasse le Grand.

- Oui, ma douce, inutile de vous énerver ainsi !

- Je ne m’énerve pas encore Hugorne, pas encore …..


****

Les deux louves se plaquent au sol. Elles sentent confusément la puissance de cette terrible émissaire, dont l’âme d’un noir de jais inonde les alentours d’une terrifiante aura malfaisante.
Les corbeaux, volatiles ô combien réceptifs aux ondes abyssales semblent surpris et paniqués devant l’incommensurable force que semble détenir l’interlocutrice d’Hugorne, et en cela, cette Méduse longiligne toute habillée de noir, leur fait peur à elles aussi.

Oreilles plaquées, elles essayent de garder dans leur champ visuel ce couple sépulcral, qui devise ouvertement sur la manière d’anéantir l’Harmonde, en toute impunité, à quelques lieues à peine de villes et de villages des Baronnies.

La bise glacée se lève, imperturbable, sur ce décor fantasmagorique, embrassant de son souffle gelé chaque être qu’elle rencontre.
Les branches craquent sous la neige, alors qu’elle se rapproche de l’étrange portail ramenant ses fils éthérés en une sarabande effrénée qui soulève la neige pourtant lourde à cet endroit. Les souffles puissants s’emmêlent en circonvolutions bruissantes, et créent une sorte de vortex éclairé par un halo pâle et blanchâtre.

La Méduse rit soudain en regardant Hugorne, ses traits se délitent, s’étirent en une forme horrible et squelettique, seul son crâne semble rester un instant suspendu, comme diaphane, juste au dessus du cercle de pierre, entre les deux chênes, qui marquent le portail.

Puis dans un rire guttural odieux et strident elle disparaît soudain, avalée par la faille, qui se referme dans un chaos souterrain qui ébranle la forêt toute entière.
Des branches se cassent de toutes parts, et s’affalent dans la neige, et le vent, violent attise encore les piqûres du froid.

Puis plus rien !

L’interminable silence, l’absolue quiétude propre à ces grandes forêts, les nuits d’hiver, pas un chant de rapaces nocturnes, pas un cri, pas un feulement, rien que la pesante chape de neige qui semble faire crouler les hautes branches surchargées d’une ouate épaisse et lymphatique.

****

- Enceinte, mais comment cela se peut il ? Mais, mais, alors … j’ai un fils !

- Mais que fais tu là Jehan, es tu devenu fou ? A quoi bon chauffer ta pièce, si tu restes des heures devant cette fenêtre ouverte ! Laisse moi la fermer, ne fais pas le sot, tu es loin d’être guéri !

- Annette, ma douce Annette, ne comprends tu donc pas ? Je suis papa !

- Décidément ce mal est sournois, il te reprend dès que nuit arrive, et te relâche à l’aube bien passée. Repose toi mon doux Jehan, repose toi, Bien des choses t’agitent en ce moment, sans que tu ne puisses en faire le tri et séparer le grain de l’ivraie.

- Annette, il faut que j’aille céans en forêt des Osselets !

- Es tu cinglé ? Il suffit maintenant Jehan, il faut que tu cesses de te tourmenter et dire autant d’insanités !

- Annette, il faut que je trouve Rescal ! Lui seul peut encore nous sauver !

- Rescal ? Mais il y a bien longtemps qu’il doit être mort, Le vieil ermite était déjà là du temps du grand père d’Ysane, ma mère m’en parlait parfois, il vivait, disait on, au centre de la forêt d’Ardenceuil, sur une île étrange, et il avait connaissance de chaque chose.
Hugues de Farmence, un vieux Baron à l’origine de cette baronnie, dit on, l’écoutait en son temps, il allait même lui rendre visite afin d’organiser l’Harmonde.
...
Il vit au cœur d’une forêt magique, un labyrinthe dont personne ne peut sortir vivant. Il garde un très vieux passage dont un docte, il y a longtemps, disait, qu’il serait à l’origine de la fin de notre Harmonde. Tu vois, ce ne sont que des fadaises, dont plus personne n’a encore cure aujourd’hui. Allez fais moi plaisir, repose toi !

- Annette, tu crois en cette histoire, vois tu je la connais aussi, tu parles de Rescal au présent toi aussi, tu peux essayer de me tromper, mais tu ne peux te tromper toi même. Sais tu si le forgeron a fini de façonner mes armes ?
Je joue contre le temps aujourd’hui, et il se peut que ce soit lui qui gagne, car je ne suis pas à mon avantage vois tu, alors ma douce Annette, aie foi en moi, je n’ai fait que servir au mieux les intérêts de Farmence, tu le sais, et ce jour, je dois sauver celle que j’aime, pour sauver nos terres. Fais moi confiance, hâtons nous !

****

- Maudite garce, déjà enceinte, il faut organiser les noces au plus vite, je n’ai pas de temps à perdre, diantre, me voilà dans de beaux draps, et cette satanée marâtre qui me menace de son ire, moi qui sert loyalement les frères mortifères depuis si longtemps ! Aïe, et cette neige, et cette forêt, mais pourquoi diable n’ai je que contrariétés aujourd’hui !

****

- Appelle les louves, elles t’entendront !
- Quoi, mais tu es folle, et si elles nous croquent ?
- Ne sois pas plus bête que tu n’ais, tu sais bien que c’est impossible !
- Mouai, mais je n’ai jamais essayé, d’abord, il suffit que pour une fois,…
- Tais toi tu sais bien qu’elles viennent de la même forêt que nous ?
- Oui et alors ?
- Veux tu que j’aille au chênais et que je raconte à tout le monde que Sévéole est le roi des poltrons ?
- Etre réfléchi ne vaut pas dire être froussard !
- Bon tu l’auras voulu !
- Non non arrête, je plaisantais, attend, je vais les appeler, heu, juste un instant ma douce !
Coucou, vous m’entendez ? Belles louves de la forêt, il faut que je vous parle, voyez vous, je suis Sévénole et voici ma compagne Miscellia, heu nous sommes très heureux de vous rencontrer….
- Et bien vas y ! Dis leur !
- Heu, et bien voilà, heu, en fait, et bien ….
- Pfff que tu es gourde alors, voilà ce qu’il doit vous dire, il faut que vous nous suiviez car nous devons vous montrer un sentier escarpé qui traverse le cœur des bois des osselets. Gertrine souhaite vous rencontrer. Il veut voir votre ami Jehan, et ce sera à vous de le conduire, dès que l’on vous aura appris le chemin !

Les deux louves s’approchent doucement, sur leurs gardes ! Bien sûr des lutins, à priori, ce ne sont pas des ennemis, bien que parfois ….

Elles comprennent parfaitement ce que leur dit Miscellia, mais au delà des forêts profondes, elles savent que Jehan ne les regarde pas.

Que doivent elles faire ?

Les terres sacrées des bois profonds ne sont pas les plus agréables à fouler, l’ironie du sort a voulu quelles soient le théâtre d’affrontements nombreux, et chaque parcelle garde en elle le goût âcre de la guerre, du sang et du fracas des armes, ainsi qu’une terrifiante aura glacée, abyssale, qui baigne chaque once de ces bois putrides et nauséeux !

****

Gertrine se tait. Il regarde tomber la neige, le temps passe, inexorablement.
Depuis qu’il garde le terrible passage de la forêt de Tristevent, il sait, que ce jour là se précise, toujours un peu plus.
Les rouages du temps mettent en place les mille arcanes insondables contre lesquelles les mancies ne peuvent rien.
La folie des hommes, apportera un jour la clé de cette plaie béante, sans se douter le moins du monde, que, dès lors, l’Harmonde n’existera plus.

La caravane noire s’arrêtera en ces lieux maudits, et le Masque alignera ses sbires, qui marcheront en cohortes bien ordonnées jusqu’aux contreforts des murs d’Ardenceuil, dont il ne reste déjà plus que les ruines.
Alors, dans la terrible épreuve, seuls quelques inspirés, pourront encore, peut être, rendre raison à ces hordes abyssales, armées squelettiques qui déferleront sur ces terres douloureuses et meurtries.

Peut être ... il en est ainsi avec les prophéties.

[A SUIVRE ...]

(*) : Selon Archébag COUTURIOT in « les abysses révélées » (Edition de l’empreinte carmine) les Plaies sont l’un des quatre types de portails connus à ce jour, menant aux Abysses. Ce sont des failles à ciel ouvert, menant directement dans les ténombres. (Cf. Souffre jour III « Les Abysses »)

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Le rêve est la raison d'un seul
La réalité est la folie de tous


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