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Le secret d'Amelune II


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 Sujet du message: Le secret d'Amelune II
MessagePublié: 25 Avr 2008, 00:18 
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Safran
Safran
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Localisation: Entre Vercors et Brocéliande
Au delà de l'enceinte de la place centrale, de larges dômes richement décorés et finement ciselés dans un or pur et limpide, reflétaient
aveuglément le soleil. Les palais des marchés s'ouvraient, les crissements des grilles qui se levaient en témoignaient.

Hummeline contemple un instant ce fascinant spectacle de la ville, qui se lève, au diapason du jour. Elle caresse les hautes statues de pierre. Celles ci ouvrent les yeux, s'étirent lentement, sortant d'un profond sommeil, et battent de leurs ailes puissantes. Une tendresse exquise perce leurs regards de silice.

Perpetri les enlace, il avait assisté, jadis, à la naissance de la pierre, à l'accouchement des âmes ! Il sourit, le regard noyé de larmes.

Voilà deux longues heures qu'Elle explique à Brabek le plan qu'elle souhaite mettre en œuvre pour éradiquer les lutins de la petite flûte.

Lui sait qu'Elle a raison, il n'a jamais eu de motifs aussi sérieux pour entrer dans le vieil hospice, et arrêter les lutins. Il sait qu'il peut enfin débarrasser les Amelins de cette vermine de marauds et de saltimbanques, qui voient tout, et savent tout de la cité.

Il sait aussi que son Maître serait heureux de cette extinction des amuseurs et des joueurs de fifres. Il ne croit pas à la magie de l'Accord, et ne pense pas avoir des harmonistes de la flûte en face de lui, comme le prétend cette vipère de Méduse. Il n'aime pas les Méduses d'ailleurs, il n'en voit que rarement, et il doit toujours, eut égard à son rang de chef de la milice, les accompagner au dernier niveau.

Il n'en sait pas plus, cela ne le regarde pas. Il se sait craint de ses hommes et des mercenaires, il ne lui en faut pas plus. Il viole parfois quelques jeunes ingénues, et les laisse ensuite en pâture à ses hommes, s'assurant ainsi leur silence et leur aide dans ses tournées nocturnes. Il ne laisse pas de témoins, jamais, l'eau de l'Arnille est profonde par endroit, et les tourbillons ne laissent jamais revenir leurs proies de chair meurtrie.

Oui, mais eux ils savent !

Ces maudits lutins, ils sont petits, se faufilent partout, de jour comme de nuit, et ont le toupet de jouer de la flûte lorsqu'ils le surprennent à faire ses tours pendables. Oui, mais comment les attraper en toute discrétion ?
Il est des choses à ne pas ébruiter. Même les Farfadets de la main
d'acier n'ont pas réussit à les retrouver, un comble !

Et s'il lance une attaque frontale envers les lutins de la petite flûte, il faut qu'il soit sûr de n'en laisser aucun s'échapper.

Impensable ! Peut être qu'en éloignant Hummeline, en l'enfermant dans les geôles froides et humides des culs de basse fosse donnant sur l'Arnille dans le coin nord des remparts des docks. Oui, mais s'il se fait prendre !

Elle est sous la protection du vieil Anderse, Censeur du Cryptogramme Magicien, et occasionnellement bras droit du Régent Toscania, grand tuteur d'Amelune. Et puis réfléchir à cette heure matinale, n'est pas vraiment pour lui plaire.

Oui, mais Elle le fascine tant avec ses yeux ! Et puis Elle est si provocante, relevant haut ses jupes sur de longues jambes fuselées. Elle a quitté sa cape, et son bustier est si … si … pigeonnant. Elle sait jouer des ses indéniables attraits, jura t il entre ses dents, Méduse va.

Instinctivement, féline, faisant feux nourris de toutes ses armes les
plus intimes, Pervicelle jugea qu'elle se devait d'être un peu plus
entreprenante. Elle n'était pas contre user de son influence charnelle pour soudoyer cet imbécile. Elle se fit insolente, défaisant lentement le fin lacet de son bustier. Il la regardait, médusé, aphone, les yeux exorbités. Il avala lourdement.

Ses seins jaillirent alors, délivrés de leur carcan de soie.
Brabeck n'en pouvait plus. Il se laissa aller à la folie avec beaucoup
de clairvoyance, et, caressant les seins lourds et saillants de la belle, il savait, qu'il signait un Pacte avec la Parques. Mais tant pis, une si jolie personne, et puis la vie après tout n'était que le Théâtre de la jouissance. Il sombra dans la concupiscence, conscient d'y sceller son destin. Il se leva, flageolant, se dévêtit rapidement, renversa la belle aguicheuse sur son bureau, et il se rua dans les énigmatiques labyrinthes de l'intimité chaude de Pervicelle.

Il est vrai, qu'Elle ne fut pas déçue de cet assaut brutal, l'homme était bien doté, et sa nature généreuse lui procura quelques râles de plaisir. Mais feu hardi s'éteint vite … et il fut bien trop rapidement terrassé par
quelques soubresauts spasmodiques.
En sueur, hébété, il s'enivra dans les yeux luisants de la belle, ignorant les serpents, qui, débarrassés du madras durant le court ébat des deux amants, s'agitaient impatients et torturés au dessus de son visage.

Ils se rhabillèrent sans hâte, presque fautifs.

- Soit, on va essayer quelque chose ma douce, j'ai peut être un plan !

Il se leva, droit comme un « i », rajusta sa ceinture en cuir clouté,
et poussa la porte avec rudesse. Elle soupira d'aise. Enfin !

Avec une précaution infinie, La plus grande des deux gargouilles tend
les bras, et se saisit d'Hummeline. L'autre fait de même pour
Perpetri. Puis, dans un élan magistral, les deux colosses battent des
ailes, et s'élèvent au dessus de la ville. Prenant soin de ne pas
quitter la luminance solaire, afin de se dissimuler au mieux dans les éclats de lumières, elles décrivent un large cercle au dessus d'Amelune, pour monter, monter, monter, jusqu'au dernier niveau de la cité portuaire.

La ville défile devant les yeux des passagers. Ils sont émerveillés, comme à chaque fois, par la magnificence des chutes d'eau, qui sautant, de toits en toits, auréolent les niveaux d'un voile transparent, lumineux, cristallin et sonore. Le soleil joue avec ces gouttes, la lumière les utilise toutes, pour se mouvoir, prendre corps et vie dans ces chutes organisées. Elles deviennent comme filtres, prismes, créant une aura superbe et fantastique, baignée de lueurs multiples, comme autant d'arcs en ciels.
Jeux d'ombres et de lumières, tressant des colliers de perles multicolores, parures aux mille nuances la ville vit, déformées, transcendée par les reflets de l'onde qui court, qui hurle sa joie et son amour voués à Diurne.

La lune lui donne une âme, le soleil une vie bien à elle. Les toitures se succèdent, de plus en plus vite, les palais du dernier cercle sont tous plus beaux les uns que les autres, rivalisant d'audace et d'orgueil. Quelques tours, scintillantes, une coupole, de longs jardins, de larges allées, une multitude d'architectures, qui se fondent, s'entremêlent tissent un canevas splendide, digne d'une Œuvre de l'Équerre.

Un tourbillon de lucarnes, de rosaces, de vitraux, d'oculus rayonnants, là un oriel sur le pan, là un oriel en surplomb, là des fenêtres à meneaux, à lancettes, des impostes, des arcs nombreux, plein cintres, surbaissés, en accolades, en anses de paniers, trilobés, paraboliques, en fers à cheval, brisés, en lancettes, Tudor, à quatre cintres.

Les gargouilles se rapprochent d'un palais de style ionien. On dirait
presque un temple. L'acrotère représente un dragon crachant sa flamme, il surplombe, orgueilleux des mutules ciselées à l'extrême. Le tympan ciselé lui aussi donne grâce à quelques scènes bucoliques, d'où émergent les Dames des saisons. Frises et architraves scindent le motif en quatre phases distinctes, scissions de pierres, supportée, chacune, par un atlante de toute beauté. Quatre colonnes ioniques organisent le palais dans l'espace. Il est entouré d'une luxuriante palmeraie. Ca et là des bassins mirent les reflets ocres de l'ensemble, tout baigné de soleil.

Les gargouilles se posent doucement. Quelques gerbes de sable blond tourbillonnent en spirales. Un homme s'avance. Il est fin, magnifiquement taillé, et porte un keffieh sur la tête. Il est jeune, le teint hâlé, il écarte les bras, et ne se soucie pas des gargouilles.
Son seul vêtement est une large toge blanche, ourlée de jaune. On
devine une mince moustache sur son visage à contre-jour.

- Mephiles ? Est ce bien toi ? Par les Dames des Saisons, comme tu as
grandis. Te voilà homme maintenant !

Lui se baisse pour accueillir Perpetri, qui se précipite à son encontre.

Hummeline se coiffe d'un hennin subtil, entouré de voilettes.

Elle arrive doucement à la rencontre de Méphiles, qui la prend dans ses
bras.

Rassurées, les gargouilles rejoignent les balustres, afin de veiller
sur les alentours.

- Mon tout petit, comme tu as changé, il est vrai que cela fait bien
longtemps que je ne t'ai pas vu. Il a les yeux noyés de larmes, il ne peut lui répondre, il la sert plus fort entre ses grands bras et les pousse, amical, vers la porte du temple, sur le naos tout de marbre blanc carrelé. Deux jarres, de chaque côté du perron, égrainent un mince filet d'eau qui tombe sur une vasque taillée en forme de conques.

- Soyez les bienvenus, - parvient il à articuler - le conseil des Mères est prévenu, elles vous attendent dans les caves .

- Enfin se dit à elle même Hummeline, dans un sourire. Je crois qu'elle a serré la main de Perpetri à ce moment là.


[…]

- Chut, écoute mieux !

- Je ne fais que ça. Tu rêves encore Micelos.

- Non, je te dis que j'ai entendu des bruits suspects derrière ces portes. De la ferraille, ou des cliquetis métalliques, sonne l'alerte, je t'en prie.

- Pff, tu divagues, c'est inutile, la preuve, j'ouvre et tu vas t'en assurer toi même !

- Nooon, ne fais pas ça !

Un lourd verrou qui claque, une huisserie qui crisse, stridente, lugubre, en ce matin tranquille. Trois petits coups frappés à la porte du malheur.

Micelos ne comprit d'abord pas ce qui venait d'arriver à son ami de toujours Lacielos. Il se retrouva écrasé entre le mur et la lourde porte, qui venait de s'ouvrir avec une brutalité indescriptible. Un gond arraché par la violence du choc vola par dessus les têtes. Puis l'effroi glaça ses membres. Ils arrivaient à la charge sur lui, petit lutin, seul devant une horde de mercenaires armés et effroyables.

Il ne se rappellera plus jamais d'autre chose d'ailleurs, car c'est à cet instant que le tranchant d'une lame rutilante, lui arracha la tête. Elle roula à quelques mètres de là, et ses yeux exprimaient encore l'incompréhension et la peur. Une botte ferrée écrasa la flûte de Micelos, comme cela, en passant, sans même s'en rendre compte, s'était là toute sa fortune.

La cinquantaine de gens d'armes courrait dans tous les sens, se ruant
comme une meute assoiffée de sang sur les pauvres lutins de la petite
flûte, qui ne comprenaient pas la raison d'un tel massacre.

Les portes s'ouvraient à la volée, claquant comme autant de sinistres
présages, et les morts s'entassaient dans la cour, dans le bassin, dans les cendres froides, ces restes de fête qui avaient illuminés quelques heures auparavant, leurs vies d'ascètes au service de la flûte.

Les plus adroits d'entre eux se perchèrent sur une corniche de la vieille tour, et se mirent à jouer une mélodie étrange, au mille accents, comme autant de nuances sur les portées inachevées.

Peu à peu la musique s'accorda, s'imposa, les premiers à en pâtir furent
les mercenaires qui n'étaient pas casqués. Ils tombaient à terre, hurlant, les yeux vitreux, se tenant les oreilles, par lesquelles le sang refluait.
Puis on assista à d'étranges scènes. Des hommes d'armes se ruaient sur les murs, têtes en avant, avec des choc sourds, et puissants.

Ils s'affalaient ensuite, baignant dans des mares de sang.

La surprise de l'attaque passée, les lutins perchés en des endroits impossibles jouaient, jouaient de leurs instruments, et cela à en perdre haleine.

Déjà les voisins accouraient en hurlant, criant à la trahison,
s'insurgeant contre ces hommes de fer, qui décimaient les petits hommes. Un tocsin sonna quelque part, des hurlements rageurs lui faisaient échos.

Quatre minotaures au service de l'ordre du Cryptogramme accouraient à leur tour. Chargeant les intrus, cornes en avant, piétinant les mercenaires agonisants. Les rues en pentes dans le vieux quartier du second niveau véhiculaient en leur sein une cascade de sang, qui se déversait vers la place du Théâtre, de l'Arène.

Quelques femmes se retournaient, hurlantes et vomissantes, d'autres, pleuraient, simplement. Les hommes montaient au pas de charge, prêter mains fortes à ces saisonins joueurs de fifres, qui étaient, tous, forts appréciés. Ils s'équipaient de bâtons, d'outils, d'armes même parfois.

Même les sages « Sans Âmes », délaissèrent leurs ascenseurs pour essayer de savoir, qui d'entre les leurs avait laissé passer les responsables d'une telle tuerie.

Bien au delà des ruelles pentues, Brabeck et Percivelle enrageaient.

Ils étaient la cause d'une véritable révolution en Amelune, et ils n'avaient toujours pas mis la main sur le lutin et sa chère Tante.

Brabeck imaginait déjà les retombées de son geste. Il encourait les
foudres nourries du Régent.

Percivelle fulminait, furieuse de voir la tournure que prenait les choses.

Ainsi ces descendants des pirates d'avant l'éclipse savaient ils se rallier à une cause, et se prêter main forte en cas d'agression commise sur l'un de leur quartier !
Jamais elle n'aurait cru cela possible. Elle pensait 'avoir à faire qu'à des pleutres, terrorisés par une action de masse des mercenaires, insensibles au sort réservé aux lutins de la flûte et, au contraire, ils se révélaient vindicatifs, soudés, batailleurs. Ils défendaient leur cité, leur port, leur famille.

Ainsi les Amelins avaient une idée de ce que pouvait être la fraternité, dans une époque si troublée, c'était là un vrai miracle. Ils défendaient corps et âmes leurs maigres biens, et au delà de cela, ils défendaient toutes les causes des habitants, même celles des saisonins.

Ainsi venaient ils de lui donner une leçon implacable, et pour la première fois de sa vie, la Méduse resta interdite devant une telle cohésion, une si belle harmonie. Et si la Merveille veillait vraiment sur ces terres, comme le disait la Légende ? pensa t elle furtivement.


Mille bises

Gaëlle

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Le rêve est la raison d'un seul
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