slagg

Nous sommes actuellement le 28 Mars 2024, 22:40

Le fuseau horaire est réglé sur UTC+1 heure [Heure d’été]


Publier un nouveau sujet Répondre au sujet  Page 1 sur 1
 [ 1 message ] 

Lutins, le carmin vous va si bien ...


Auteur Message
MessagePublié: 24 Avr 2008, 11:36 
Hors-ligne
Safran
Safran
Avatar de l’utilisateur

Inscription: 17 Sep 2007, 06:50
Messages: 75
Localisation: Entre Vercors et Brocéliande
Biens chers Inspirés. Voici quelques mots, quelques instants rares, calice précieux de nos songes, folie ordinaire d’un monde enchanté, où chacun tutoie le folie de ses songes. Ne détient il pas alors, un fragment de la Vérité ? Seuls les songes ont le pouvoir de nous faire approcher les Muses....

[...]

La lumière jouait avec les reflets des marais stagnants, croupis de l'ancienne forteresse impénétrable du Nord d'Urguemand, à l'Est du mur de la foi.

Séphlin captivé, regardait ce couple de licornes s'ébattre, joyeux, sur les contreforts d'une petite île, sise au centre des marais.
Il ne lui avait jamais été donné de croiser ces animaux mythiques, alors qu'il courrait les bois depuis plus de trente longues années, à la recherche de telles Merveilles.

Un caprice du ciel, et quelques tâches de brumes voilent l'astre du jour. La flamboyance s'interrompt un instant, maculée par les ondes flottantes.

Un cri d'oiseau, un échassier, sûrement là bas, derrière les roseaux qui frissonnent.
Un éclat de lumière, plus crue, plus brute, plus terrible.
Une chaleur enivrante, suave et odorante. Un arc en plein ciel.

Il plisse ses yeux fatigués. Il ne distingue plus rien. Jeux de miroirs, éclats multiples, prismes fantasques, les images se forment, se déforment au rythme des nuances. L'ombre s'estompe. Il scrute, stupéfait : l'île n'est plus.
Quelle est donc cette nouvelle étrangeté ?

Séphlin est un lutin, il n'a plus de clan depuis longtemps déjà.
Jadis suspecté d'avoir dévoilé une partie du Mystère à ses amis Farfadets, le Vieil Erhnama, chef du Clan des Oursesieilles lui avait alors fait comprendre, à l'issue d'une longue cérémonie, qu'à l'aube son destin devait le pousser loin des frontières de ses frères.
L’aube à peine ébauchée, il était alors parti, triste, sans se retourner. Il n'avait jamais voulu repenser à son clan depuis, ni même à Féflia sa promise.

Il aimait la compagnie des loups. On ne sait pas pourquoi, lui même l'ignorait sans doute…..

Un détour de sentier, une louve, pleine, qui souffre, la patte déchirée par un instrument cruel. Un regard, deux yeux fauves qui se fondent en lui, s'immisçant en son plus intime refuge.
Deux agates d'or liquide qui implorent. Un geste fou, une complicité soudaine.
Deux sangs qui se mêlent, hurlant leur attachement.
Une compresse d'eau fraîche, un bandage rustique, beaucoup d'amour, et quelques jours plus tard, deux êtres inséparables.
Une portée de huit jeunes, trois mâles vigoureux avant l'âge.
Une meute qui se glisse, leste et agile, entre les fougères humides.
Des années de complicité.

Ainsi se scellent les destins des Mondes, sans témoins, sous les auspices des grands arbres des forêts profondes.

D'autres jeunes, d'autres meutes, puissant matriarcat dont il est le censeur.
Louvier, louvetier, lupin, combien de qualificatifs courent ainsi après l'évocation de son nom aux détours des mille landes de l’Harmonde ?
Combien de bouches qui se tordent, d'yeux qui se ferment, d'âmes qui fuient. Suppôt démoniaque, même les conjurateurs d'Abyme, au Nord de ses marais, craignent de le rencontrer.

Il est l'ami des loups, des feux follets, des Démons, il est fou, il est sauvage, il est laid.

Et pourtant Séphlin se frotte encore une fois les yeux. Non il n'a pas rêvé, il a bien vu cette île et ces deux animaux légendaires.
Il avance, lentement. Les hautes herbes l'entourent doucement, il avance sans bruits, les joncs lisses et courbés épousent ses pas, respectueux, il fait partie de cette terre humide et ingrate des longues bourbières d'Azanarysses.

Il avance, devançant de quelques pas Mytikes, sa louve d'adoption.

Une odeur chargée de miel, de fragrances exquises et nuancées, quelques pétales de roses, un grand bouquet d'œillets. Effluves du rose pourpier, des chatons de saules, et des senteurs capiteuse des aulnes, écrins des ébats satyriques.

Quelques nénuphars, ondulent encore doucement, sur l'eau qui affleure en clapotant.
Elles étaient là, l’île aussi d’ailleurs, il ne pouvait avoir rêvé. Tous ces parfums l’indiquaient.

Sa louve le regarde, placide.
Il lui ébouriffe la tête, et saute sur son dos.
Instinctivement elle se plaque au sol, ondule doucement, et courre à travers les brumes naissantes de ce reste de jour.

Une borne anodine, noire usée et grevée par les moult éléments de ses mille années.
Un secret oublié.

Quelques traces luisantes.

Séphlin s'avance avec prudence. Bizarrement, sa louve ne le suit pas, comme bloquée par cette frontière invisible. Elle s'assoit, distraite, cherchant un prétexte à hurler à la lune naissante. Quelques échos lointains. Ses fils ont faim.

Elle part, brusquement, vivre sa vie de loup.

Le globe vitreux d'une lune poussive ensanglante les marais.
Un arbre décharné hirsute, ombre chinoise dérisoire, mis en avant par l'auréole céleste.
Un hibou qui frôle le lutin de son vol hésitant et silencieux.
Quelques batraciens alanguis par le froid rude de cette saison étrange gémissent sourdement.

La forêt s'éveille de ses mille bruits nocturnes.

Ca y est, il les aperçoit. Ils dansent, comme toujours, au dessus des marnes sales et putrides. Ils sont sept, sept petits êtres de feu

. Il avance prudemment.

Au loin Mytikes lance la chasse. Son long cri guttural s'affaisse soudain, repris par d'autres représentants de sa noble race. Etranges mélopées suaves et rauques tout à la fois.

Séphlin affirme sa main sur la crosse de son long bâton de marche. Il avance vers les lueurs. Il sait que ce qu'il fait n'a encore jamais été tenté.

Ils le voient, ils le suivent, ils l'épient.
Il avance. Il les trouble.
Ils s'arrêtent de danser soufflés par cette audace.

- Bonsoir Amis des astres …
- Qui es tu Lutin ? Pour oser venir troubler le Conseil ?
- Séphlin, humble lutin, sans toits, sans clans. Marcheur et veneur tout à la fois.

Il prend sa longue flûte, délaissant un instant son bâton ferré.

Un papillon affolé se pose, débonnaire, sur l'instrument qui s'enflamme soudain dans une douce mélodie venue de la nuit des temps.

Les êtres de feu s'interrogent, un musicien, veneur, Lutin de surcroît, ne peut être mauvais … ou n’est au pire que grand menteur.

Ils sont sept, ils épousent les aspirations profondes de cette
Harmonie nouvelle, ils sont biens, apaisés, heureux.

Une île, … oui ils la connaissent … oui ils savent la situer … oui ils peuvent l'y emmener !

La musique se fait douce, effleurant les notes, arpèges délicats et subtils, union des âmes par delà les flammes, Inspiration confuse et maladroite.

Maintenant Séphlin voit le chemin, les ornières et les embûches qui l'attendent.

Les Esprits sont clairs limpides, joyeux au delà de ce que l'on imagine en les voyant.
Ils sont l'esprit des fêtes, âmes des rires et des danses, instincts des notes raffinées, aux mille nuances, mémoires des Mille Tours rescapées du raz de marées de la Tarasque, ils sont légendes, contes, Histoire intimement liés dans un conscient collectif qui s'amenuise en un flou irrégulier.

Ils sont la Mémoire de l'Harmonde, ils sont les aïeux de chaque race, chaque fragment de vie des Royaumes, ils sont les cils d'Agone, les racines du Souffre Jour, ils sont les morceaux oubliés du grand puzzle, les chaînons manquants. Ils attisent les peurs des hommes, feux follets aux mille facéties, belliqueux ou farceurs, à leur vue courage vacille.

Deux yeux d'encre noire qui le fixent un instant. Séphlin effrayé gâche une note, la vision s'estompe, il n'a plus le contrôle, il s'arrête de jouer, incapable de prendre la moindre décision.

Les hululements des hiboux effrayent les passants, les marais vivent et s’éveillent à la nuit.

- Tu as vu, Séphlin, les yeux de ton ennemi et du notre. Te voilà complice des Sentences, Disciple de la mémoire. Tu sais ce que tu dois faire maintenant, va !

Il se retourne sans mots dire. Il ne sait plus, il ne sait pas ce qu'il vient de vivre.
Images fugaces, son esprit refuse ce que ses sens lui ont offerts.

Dorénavant il sait que plus rien ne sera comme avant !

Les herbes s'écartent à son approche. La lune glisse, silencieuse sur les marais tranquilles. Une cloche résonne au loin.
Par delà les brumes qui s'effilochent, s'accrochant dérisoires à ces restes de branches noires et sèches, il voit déjà les contreforts de l'île.

Une large barque noire, un vieil homme, perdu dans les limbes oubliés d'une mémoire vacillante, quelques longues poussées d'une canne grossière, et malhabile, qui griffe les flots sombres et secrets, balafrant d’un éclat de lune la surface immobile des marais de souffre.
Le rude contact avec la terre.

L'herbe suave et odorante, les délices de pétales et de miel, la chaleur soudaine, un torrent limpide où s'abreuvent deux merveilleux destriers arrogants de beauté altière, à la robe d'or et à la crinière blanche, enserrant une longue corne aux multiples ciselures hélicoïdales.

Une sympathie soudaine, une amitié évanescente qui se forge dans un alliage indéfectible.

Elle est là, entre les deux licornes, nue, belle à couper le souffle.
Ses longs cheveux d'or glissent sur ses hanches callipyges, ses yeux rieurs, d'un vert étrange, pareil à l'écorce amère et veloutée des amendes, un sourire sage sur des dents blanches, une peau satinée, fraîche et douce, aux fragrances délicates et capiteuses, ingénue, divine, unique, Ses seins galbés qui invitent à la caresse paresseuse aux émois transcendés. La blancheur de sa peau, qui dessine ces formes sublimes, soulignant les ombres d’un éclat immaculé.
Elle est si belle.

Médusé, Séphlin ne peut faire un autre pas. Il est fasciné par tant de beauté. Il s'agenouille, son bonnet entre ses mains unies, et il s'adresse, implorant, à la Dame :

- Ma Dame, que vous êtes belle. Que vous êtes … belle, que vous êtes ……

- Sois le bienvenu en ces lieux de pureté, Séphlin, je t'attendais.

- Vous, …… vous attendiez, je veux dire, pardonnez moi, vous, enfin, vous m'attendiez moi ?

- Oui Toi, Séphlin le veneur répondit elle en souriant.

Sa voix pleine et charmeuse était plus mélodieuse que toutes les flûtes accordées de tous les Royaumes, jamais il n'avait été donné à son oreille musicienne d'entendre pareille extase. Une harmonie superbe, pure, sans la moindre erreur. Osmose des notes accordées par le rire d’Orphèle.

La beauté la plus parfaite. La simplicité dans son plus simple appareil.

- Mais, je ne vous ai pas fait attendre au moins ?

- Non, (elle sourit), te voilà depuis peu chargé d'une bien lourde tâche mon Ami, pardonne à ceux qui t'ont fait mal, et qui ne cesseront de te blesser, fais taire tes sourdes rancunes, ouvre ton Âme aux autres, ………… Inspire les !

Te voilà dépositaire de la Mémoire de nos Peuples.
Il te faudra courir les mille chemins de toutes les contrées, pour siffler les Accords de cette ballade, mon Ami, une bien belle ballade au demeurant, qui saura dénouer les cœurs les plus noirs ! A toi de mettre ta verve au service de ceux des Royaumes, à toi d'informer sur les Dames, sur l'Automne et sa perversion, et sur les Ombres, qui défient l'Ordre Établi.
A toi de parler des Masqués, et de leur Maître.
A toi de te faire rabrouer par les incrédules, à toi de fuir les villes asservies, à toi d'éviter les pièges des Masquards, chaque jour plus puissants.


Aujourd'hui tu es ma voix, leur salut peut être. Redonne vie aux rêves les plus fous, renforce l'Imaginaire des Peuples, rencontre Agone, distille les flammes, inspire les plus sages d'entre eux. Ne faillis pas à ta mission, Mon Ami, car tu détiens le Pouvoir, le seul Pouvoir de la Vie : La Mémoire !

- Oui, mais, mais, enfin pardonnez moi, mais, mille pardons, mais, qui êtes vous ?

- Je suis …. ta bienveillante marraine !

- ô je vous aime ma muse, je vous … je vous …. Soyez bénie.

- Séphlin, ton pouvoir est grand, très grand même, découvre le doucement, et apprivoise le.
Ais confiance en tes loups, ouvre ton cœur aux ternes, aide les, car tel est ton pouvoir.
Je ne fais qu'affirmer les décisions du Grand Conseil.
Use de stratégies, manœuvre les plus grands, utilise les crédules, sers toi de toutes tes armes, car tu dois distiller la Mémoire, en tous et partout.
Tu es devenu un pariât pour les sombres disciples.
Fuis toujours les ombres et sème l'Éclat.
Va maintenant, et accomplis ta tâche, pour moi, pour ta Dame, pour les tiens et pour les autres aussi.
Te voilà Inspiré ! Ma voix te guidera, et mon souvenir t'escortera, t'aidera à supporter les vindictes qu'il te faudra maintenant affronter.
Va mon Lutin, Va !

Longtemps encore, Séphlin resta ainsi, agenouillé dans les herbes folles aux senteurs multiples. Déjà la lune tombait lorsqu'il se releva enfin, baigné d'une nouvelle lumière .. flamboyante.
Rêve, songe, il ne se souvenait de peu de choses, mais quelque part en lui, il savait ! … il savait combien serait difficile le chemin qu'il avait choisi et que la Dame lui avait confié.

Confusément il lui semblait savoir plus de choses, comme si un long et méticuleux ordonnancement avait été agencé au sein de son esprit, comme une ultime confiance qu'Elle lui avait accordée.

Il savait, et il devait le faire savoir.

Le passeur l'attendait. Il lui tendit une main décharnée pour l'aider à monter dans l'esquif au plancher plat. Sans un mot, il lui fit parcourir la courte distance entre l'île et les marais.

Au loin sa louve hurlait, tout à sa chasse.

Irréel quotidien.

Débarqué sans hâte il regarda le passeur se noyer dans les brumes de ses songes, et, bien plus tard, lorsque le soleil illumina la scène, il vit qu'il n'y avait pas le moindre lac.

Seule une odeur persistante aux fragrances délicates et rares, baignait encore les lieux.

Une chaude toison lui frotta la main, il caressa Mytikes. Elle était son alliée, sous le regard bienveillant de la Dame, et je crois qu'il passa un long moment à lui expliquer ..... leur futur ……

[...]

L'essentiel est peut être de laisser aux choses qu'on montre, leurs contours mystérieux.

Mille bises

Gaëlle

_________________
Le rêve est la raison d'un seul
La réalité est la folie de tous


Haut
 Profil  
 
Afficher les messages publiés depuis:  Trier par  

Publier un nouveau sujet Répondre au sujet  Page 1 sur 1
 [ 1 message ] 

Le fuseau horaire est réglé sur UTC+1 heure [Heure d’été]


Qui est en ligne ?

Utilisateurs parcourant ce forum : Aucun utilisateur inscrit et 6 invités


Vous ne pouvez pas publier de nouveaux sujets dans ce forum
Vous ne pouvez pas répondre aux sujets dans ce forum
Vous ne pouvez pas éditer vos messages dans ce forum
Vous ne pouvez pas supprimer vos messages dans ce forum
Vous ne pouvez pas transférer de pièces jointes dans ce forum

Rechercher:
Atteindre:  
cron