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L'Equerrine IV


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 Sujet du message: L'Equerrine IV
MessagePublié: 24 Avr 2008, 11:14 
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Safran
Safran
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Localisation: Entre Vercors et Brocéliande
Assieds toi mon garçon, voilà une tisane qui te requinquera avant de visiter cette bâtisse.

[Joignant le geste à la parole, Armione dépose devant Arminin un bol fumant à l’odeur aigrelette].

Ce sont des baies de scarabaeus cerisum, que je cueille dans les bois défendus. La particularité de ces cerises amères, dites cerises aux scarabées est qu’elles mûrissent une fois tombées de l’arbre. Ainsi peut on les manger fort tard dans la saison. Il est vrai qu’elles renferment un peu d’alcool, mais trois fois rien, et sont utiles en pâtisserie. En concoctions, fermentées dans du jus de prêle sauvage, elles soignent toutes sortes de maladies bénignes. Par contre, si on les mélange à des shyarrhées des champs, elles deviennent poison mortel.

Voilà, et si tu en veux d’avantage, n’hésite pas à me demander, je vais reprendre la fabrication du pain de la journée. Si tu as besoin je suis dans le cellier, il faut emprunter le petit escalier derrière l’estrade. A ta santé Messire Arminin.

Mille mercis Madame Armione, je vais déguster ce délicieux breuvage, et attendre Arciferia. Ne vous inquiétez pas, je saurai où vous trouver. Merci encore ....

Il n’y a pas de quoi. Si tu es encore là tout à l’heure, je te ferais goûter le repas de midi. Tu verras il est succulent. En attendant il faut que j’y aille.

Dépassant la cheminée, Armione oblique vers un coin plus sombre d’où émerge une estrade de bois. Puis elle disparaît au regard du lutin.

Arciferia apparut alors de la petite salle, portant un seau d’eau fraîche.

Me revoilà, alors tu as fait connaissance avec Armione ! Elle est très gentille sous ses airs bourrus, sans elle l’école ne tournerait pas. Elle s’occupe de l’intendance, du ménage, de la cuisine, des petits soins qui sont nombreux dans une école de la cyse, elle écoute aussi les nains ou les autres élèves lorsqu’ils ont un peu de vague à l’âme, les réconforte. Elle croit que les Danseurs viennent rapiner chaque nuit dans sa cuisine, [sourire] , mais c’est moi qui me charge des friandises qu’elle laisse à leur intention. Eux ne mangent pas, mais elle serait malheureuse de découvrir la réalité ! C’est la seule qui ose s’opposer à Scabiosus. Elle crie plus fort que lui, car elle sait qu’il abdique toujours devant elle et part en maugréant dans sa barbe. Il a mauvais caractère, mais son savoir est immense et son périple incroyable. Il connaît les grands de l’Harmonde, et poursuit, comme je te l’ai déjà dit, une quête sans fin, qui lui prend tout son temps. Son atelier est au sommet de la dernière pyramide, celle qui nous fait face. Personne n’y entre, ni ses disciples, ni Armione. Il y accueille quelque fois le baron de Farmence, il s’enferment alors de longues heures, et le baron n’en redescend qu’au petit jour, passe prendre une tisane chez Armione, puis file attaquer sa journée de labeur. Il a un laboratoire qui jouxte l’atelier. Il possède un herbier unique et convoité, l’un des plus fourni de tout l’Harmonde. [.....] D’ailleurs, il y a quelques années, un Farfadet est venu le lui demander. Il était recommandé par un Gros, et accrédité par une liasse de sauf-conduits aux seings de cire tous plus beaux les uns que les autres. Confiant Scabiosus lui a permis de feuilleter son herbier. L’entrevue fut brève, et le farfadet nous quitta précipitamment au milieu de matine. Ce n’est que le soir que nous fumes tous réveillés par le cri douloureux de Scabiosus, qui venait de se rendre compte que le farfadet lui avait dérobé une fleur séchée de son herbier. Une fleur unique à laquelle il tenait comme à la prunelle de ses yeux. Il nous en parla, à Armione et à moi, alors qu’il épanchait son chagrin dans cette salle, à la place où tu es, en buvant une eau de finules. Il s’agissait d’une talcine, je crois, une fleur bleue qui protégerait les lutins de la pierreuse, une maladie qu’ils contractent en ville, comme tu dois le savoir. Elle était associée à une méduse, qui avait crée une école extraordinaire en république mercenaire.....

Tu parles toujours trop ma petite Arciferia !

[Je sursautai n’ayant entendu personne entrer. Arciferia se mura dans un air surpris et désolé, pareil à celui qu’aurait fait un enfant pris entrain de faire une bêtise. En me retournant j’observai un vieux nain au teint pâle et à la barbe blanche clairsemée par endroit. Ses yeux tristes et délavés me scrutaient avec une attention soutenue, ce qui semblait lui demander un effort extraordinaire].

Maître Scabiosus, je je suis désolée, je vous apporte un bol de tisane ?

Non merci douce enfant, présente moi plutôt ton ami.

C’est Messire Arminin, Maître, il est de passage en notre cité, et je lui ai promis de lui faire visiter notre école. Sa connaissance des Arts semble des plus illuminée, si je puis me permettre, et il dresse un état des lieux des écoles en Harmonde. Je me levai alors, fixant le vieux nain, essayant de percevoir une once de ce à quoi il pensait sur le moment. Mais malgré ma longue habitude du discernement, il ne m’offrit aucune aspérité à laquelle m’accrocher. Son visage était de marbre, indéchiffrable, indéfinissable, altier et charismatique. Ses mains usées par le labeur de la Cyse étaient grandes et meurtries. Ses gestes devaient être moins sûrs qu’avant, et les coups maladroits plus fréquents. Il se servait de la mancie comme d’une seconde nature, usant de mille stratagèmes adroits pour savoir à qui il avait à faire.

Je suis content de t’accueillir en l’Equerrine. Vois ce que tu dois voir, instruis toi, pose les questions qui te semblent utiles, décide de ton chemin dans les arcanes offertes. Tout me porte à croire que tu en es digne. Même Derostène semble subjuguée et ce n’est pas peu dire [sourire], et maintenant Arciferia, qui t’offre toute sa confiance.....

Je vous remercie de cet honneur Maître Scabiosus, je suis Arminin, lutin de la chênaie des Arpenges, au Nord de l’Empire de Kesh. Ma vie est déjà longue, et ma route sinueuse. Je cherche à connaître toutes les écoles de l’Harmonde. Ma quête est infinie il est vrai, chaque jour voit naître une nouvelle école, compensant ainsi le déclin d’une autre. Mais je suis le témoin, et tel est mon destin.

Nous avons chacun nos chimères, Arminin, sans elles nous ne serions rien, ou si peu de choses. As tu déjà pensé à ce qui te faisait vraiment courir, enfant du désert ? Pourquoi as tu pris un jour ton bâton de pèlerin, qu’elle force t’a poussée à affronter les climats, les maraudeurs, les périls de l’errance, et à abandonner ton gîte et la sécurité de ta forêt ? A quels ordres impérieux réponds-tu en silence, lorsque tu es transi de froid, trempé, en terre inhospitalière ? Ne partages-tu pas la soif de connaissances, la même qui agite l’arpenteur des Mondes, l’apprenti, le Maître, le chercheur, le fou, l’artiste ? Ne fais tu pas partie des dernières Flammes, qui illuminent les (tableaux) mondes trop ternes depuis la terrible malédiction de l’Eclipse ? Et si au fond de toi t’animait, sans que tu en sois conscient, le désir de vaincre le Crépuscule, de ranimer les Flammes, de retrouver les routes du Centresprit, de réparer les fautes ? Si tu fais tiennes les douleurs de notre beau monde, si tu te sens responsable, si tu espères jouer un tout petit rôle dans la grande horloge du temps, alors tu es des nôtres, nous les éternels vagabonds. Tu détiens une part du savoir déchu, à toi de trouver ta place, de manoeuvrer les capes et les faux semblants, à toi de te servir de tes expériences, pour rejouer la pièce, dénouer l’intrigue et battre le Masque. Tu es sur la bonne voie, Arminin, tu caresses déjà ta révélation, tu trouveras une réponse ici, un début de piste, qu’il te faudra suivre, encore et encore jusqu’à ce que tu la comprennes, et peut être la conjure. Penses à tes poussières, à ces halos timides qui perlent le non sens, tes néants d’abstrait qui irisent la seule vérité du concret primal, source de tes névroses, absolues quintessences du chemin que tu te traces. Les hautes destinées sont à la portée de ceux qui veulent s’en saisir et bravent leur incertitudes sans pour autant avoir une réponse à chaque chose. Il suffit parfois d’une seule réponse, LA réponse, pour dénouer les fils des intrigues les plus profondes. Cerne enfin les contour des symboles, vois au delà de l’autre, tu te rapproches chaque jour plus près de ton but.

Merci de vos sages conseils Maître Scabiosus, je vais essayer d’en extraire l’intrinsèque essence, afin de poursuivre ma route. [silence] Je vais vous offrir un cadeau, il me tient à coeur mais j’aurai sûrement l’occasion de le retrouver. Il est unique à mes yeux, et remplacera cependant celui qui vous paraissait tout aussi unique. Pourtant il n’est que même essence, mais de sa rareté naît l’envie de le posséder, de le conserver, de le chérir. On y voit autre chose, il devient intemporel, nous rappelle un souvenir, un instant précis de notre vie d’errance, un point d’ancrage de notre esprit au milieu de la fuite du temps. Il devient référence, point cardinal, boussole, axiome duquel repartent d’autres errances jusqu’à un autre souvenir, qui remplira le même rôle juste un peu décalé. Notre vie n’est plus que souvenirs, qui s’articulent au sein de notre âme grâce à ces balises uniques et si nombreuses. [Arminin ouvre son sac et en sort un carré de dentelles immaculé. Il le déplie doucement, et dévoile une fleur merveilleuse, d’un bleu fait de mille nuances qui s’agitent et vivent chacune un instant au gré de la lumière distraite. Le vieux nain sert nerveusement ses mains autour du dossier d’une chaise. Ses yeux étincellent de bonheur à la vue de cette petite plante, et une larme coule sur ses joues creusées au sein de ses chairs usées. Il s’agit d’une talcine à l’odeur suave et unique aux fragrances de pollen. Je suis passé dans cette école Maître Scabiosus, il y a déjà longtemps, et mon coeur s’est épris lui aussi de ces fleurs uniques et merveilleuses, qui ne poussent que dans un jardin, à quelques mètres de l’école Prima. On raconte qu’elles ont pris les nuances des yeux d’une méduse du nom de Talcina, qui avait crée ladite école. L’histoire se répète inlassablement. Talcina tomba amoureuse d’un satyre, elle l’attendit longtemps alors qu’il lui avait promis de revenir vivre à ses côtés, mais les promesses sont parfois silencieuses, lettres mortes, abandons. Elle mourut un soir d’été, alors qu’elle attendait, fidèle à ses habitudes, le retour de son amant, an milieu d’un jardin inondé par ses larmes. Ainsi naquirent ces fleurs, qui baignées par les peines de la belle méduse, prirent la couleur de ses yeux pleins de chagrin. Depuis elles poussent uniquement dans ce jardin et sont toujours tournées vers le Sud, car c’est de là, dit on, que devait revenir le Satyre amoureux. Bien plus tard on découvrit que ces fleurs guérissaient les lutins de la pierreuse, une terrible maladie qui nous décimait tous. L’un d’entre nous, dès lors qu’il habite en ville, risque de plonger dans une lente régression teintée d’un spleen incommensurable,qui le mènera inexorablement au trépas.

Arminin, je te remercie ! Sache que tout au long de ma vie, peu de présents me firent autant plaisir que celui ci. Mais au delà de cette merveilleuse talcine, tu m’as donné de précieux conseils, tu m’as ouvert les yeux sur de nouveaux horizons que je vais aller étudier. Tu m’as donné aussi une leçon, vois tu, c’est que tout individu s’attache à ses souvenirs, qui régentent sa vie et lui permettent de rebondir, de se reconstruire, de reformuler de nouvelles hypothèses, d’avancer vers son but ultime, ou, au contraire l’ancrent indéfiniment à un épisode douloureux qui l’engourdissent et l’empêchent de se reconstituer. Ainsi nous voilà tributaires de nos expériences, qui, si elles sont mal maîtrisées, ne peuvent que nous nuire. Vois tu, parfois les obstacles les plus difficiles sont en nous. Ton présent me donne une inspiration nouvelle, comme s’il me permettait de refermer un trou béant qui me faisait souffrir atrocement, et qui masquait mon véritable but. La finalité de mes recherches me semble enfin à portée de mains, comme si un voile sombre et opaque m’avait habilement dissimulé la finalité absolue de ma vie vouée à la recherche. Vois tu ce que je veux dire, Arminin ?

Oui, du moins je le pense, comme si on avait soudainement enlevé une écharde noire à votre âme, un lointain relent du Ténarbre ......

Décidément Arminin, tu es surprenant. Ton analyse est vive, sagace, précise, subtile, logique, lucide, intuitive, naturelle. Ton esprit vagabonde au delà du carcan trop précis des réalités primaires, tu trempes ton essence dans les mondes parallèles, dans les mille feux du vase de la connaissance, tu es vraiment digne de cette École, je suis heureux de t’y accueillir, je souhaite qu’Arciferia te fasse découvrir cette marche magique, qui te permettra d’aborder un nouvel espace de réflexions, de rajouter une corde à ton archer, afin de trouver une nouvelle sonorité, un nouveau sens caché, lorsque tu joueras de l’instrument des âmes.
...
Que tu partages ce sentiment d’exaltation sublime, qui devient de plus en plus rare avec les années qui passent, rythmées par le grand sablier du temps.

Justement Maître Scabiosus, je m’apprêtai à l’inviter en l’Equerrine. Puis je tout lui faire visiter ?

Oui chère enfant, il m’a offert plus que je ne pourrai le faire, et tes mots, lestes il est vrai, ne sont pas sortis sans raison de tes lèvres, oublie ce que je t’ai dit lors de mon jugement trop hâtif de tout à l’heure. Il devait être écrit quelque part, que tu devais lui parler de cette belle talcine. Il est des chemins aux contours étranges qui n’existent que par quelques volontés supérieures, qui organisent le grand champ de la connaissance. Vestiges des arcanes, rappels des mancies expertes et lointaines, union sacrée du Centresprit. Merci de ton innocent bavardage ma petite, il m’a ouvert tout grand l’axe de mon travail futur, trop longtemps maintenu en absurdes puits emplis de ternitudes. [Adressant un sourire bienveillant à Arciferia, et une vigoureuse poignée de main à Arminin, le vieux nain se redresse, et sort lentement de la pièce. Son dos voûté semble un peu moins lourd à porter alors qu’il s’éloigne doucement dans la cour, à la poursuite de ses chimères] Arciferia sourit. Son regard dépasse les lignes de mon être, sa joie naïve et impatiente me regarde d’un oeil neuf, je ne suis plus quelconque, je suis Arminin, j’existe dans ses yeux pleins de bonheur.....

Merci Arminin, je n’ai jamais vu Maître Scabiosus ainsi, il avait une jeunesse dans la voix, une étincelle trop longtemps contenue est soudain reparue lorsque vous lui avez offert cette merveilleuse fleur, je ne vous remercierai jamais assez pour cela !

Ne suis je plus digne de l’Equerrine ?

[surprise] bien sûr que si ? Pourquoi cette question étrange ?

Je préfère quand tu transformes le »vous » stérile en « tu » cordial [sourire amusé], mais dis moi, qui est donc Derostène dont Maître Scabiosus m’a parlé ?

Il ... il s’agit de sa créature, l’une des trois gardiennes de l’Ecole, la première gargouille... Je n’ai rien à vous heu, pardon, à te cacher, alors il est temps d’entrer dans les salles de l’Equerrine.

Comment as tu trouvé mon breuvage Lutin de la chênaie des Arpenges ? Cette tisane était elle à ton goût ?

Exquis, tout simplement chère Armione ! [je pensais que cette femme, sous ses faux airs débonnaires et agréables était une redoutable et sympathique espionne. Rien ne devait lui échapper dans l’école. Elle avait tout entendu ... du fin fond de sa cave ... ! Elle devait tout savoir sur tout dans ce monde clos. Instinctivement je lui vouai une grande admiration]

Et bien allons y maintenant cher Arminin ....

Je te suis, douce Arciferia.

[A suivre ...]
Mille bises
Gaëlle

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