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Balafres et mise à terre III


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 Sujet du message: Balafres et mise à terre III
MessagePublié: 24 Avr 2008, 10:59 
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Safran
Safran
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Inscription: 17 Sep 2007, 06:50
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Localisation: Entre Vercors et Brocéliande
Les jours passaient rapidement. Après m'avoir appris à tuer de grands reptiles, noirs et jaunes, ou à ramener des poissons aux multiples couleurs en se servant d'un filet lesté, après m'avoir fait découvrir une multitude d'animaux magnifiques que je ne connaissais pas, Affizza était devenue une amie, qui veillait sur moi comme sur la prunelle de ses beaux yeux sombres. Elle parlait peu, mais m'emmenait partout avec elle, me donnant les informations qui allaient m'être indispensables pour me déplacer dans ces forêts fabuleuses. Elle souriait toujours, habillée d'une simple tunique de peau, elle me montra les grenouilles Akarsis, minuscules batraciens aux couleurs rouges écarlates, qui pouvaient bondir sur leur proie à la vitesse de l'éclair, et qui les tuaient simplement par le contact de leurs peaux, recouvertes de multiples et violents poisons. Elle m'enseignait le nom des plantes, des fleurs, des simples, m'indiquant leurs usages et les traitements qu'elles pouvaient apporter. Elle me montrait les pièges de la forêt comme ces lianes sanglantes, qui s'enroulent autour de tous corps s'approchant trop près, et qui les déchiquettent, ou ces jolis arbustes recouverts de fleurs mauves, qu'une multitude de papillons viennent butiner. Ils sont pleins d'épines, qui s'enfoncent dans les chairs, et remontent sous la peau jusqu'à venir bloquer le coeur. J'apprenais chaque jour d'avantage de choses utiles, qui me permettraient peut être de survivre un petit peu plus longtemps dans cet univers que je ne connaissais pas.

Je crois que durant ces quelques jours, les oiseaux m'ont subjugué par le foisonnement de leurs couleurs, la diversité mélodique de leurs chants, sublimés par les caresses affectueuses des vents, qui nuançaient chacune de leurs mélodies.

Encore aujourd'hui, je pense que mon oeuvre est influencée par les mille lieds qu'il m'avait été donné d'entendre durant ces moments intenses et exaltants.

La lune était voilée, il faisait presque nuit, et le silence de la forêt semblait étrange et inquiétant. Affizza me réveilla doucement. La longue hutte était calme, bercée par les respirations des femmes.

Je me leva avec peine, quittant à regret la quiétude de ma couche, et m'habilla en silence. Je rejoignis mon amie, une chape de plomb recouvrait la forêt, rien ne bougeait, quelques feulements lointains, un cri soudain, quelques branches qui s'agitent, et le calme de la nuit.

Je regardais une dernière fois ce camps apaisant au sein duquel j'avais reçu tant d'amour. Affizza me posa la main sur l'épaule, m'entraînant doucement vers la sente, qui plongeait au coeur de la canopée.
Nous marchions vite. La cascade était déjà loin, et pourtant je me forçais à l'entendre encore, comme un lien tenu que je ne voulais pas couper avec ce havre de paix. Un étrange silence nous oppressait. Affizza semblait ne pas s'en rendre compte, mais les stigmates de la peur sourde effleuraient parfois sur son visage fermé. Le sentier était assez large, nous aurions pu marcher toutes les deux de front. Les quelques plantes indésirables étaient coupées avec habileté par Affizza, qui avançait avec un de ces grands coupe-coupes, dont aucun autochtone ne se séparait jamais.

Soudain elle se retourna d'un bond, et m'attrapa la main. Son coeur battait à tout rompre. Ses yeux affolés me fixaient, cherchant un apaisement, un indice, une réponse. La prenant contre moi, je me penchais pour voir ce qui la terrorisait ainsi.

Il était là !

De larges branches formaient une sorte de long auvent, qui protégeait un parterre d'herbes hautes. Deux grands tigres se dressaient doucement de leurs séants, nous fixant avec attention. Ils étaient tous les deux d'un blanc immaculé strié de larges bandes dorées. Leurs yeux d'un vert soutenu nous observaient avec une fixité abominable. Leurs poils, qui se dressaient sur leurs échines, les rendaient encore plus effrayant, doublant ainsi leurs volumes. Derrière eux, je discernais une petite hutte, ainsi qu'un meuble blanc aux formes bizarres, sur lequel était assis un tout petit être, qui ne devait pas atteindre le mètre de hauteur, alors qu'il se dressait pour voir qui arrivait.

Affizza voulait s'enfuir, elle avait lâché son coupe-coupe, et je ne la retenais qu'à grand peine. Dans un souffle elle murmura : « Laisse moi partir, fuis, c'est Evidaar, l'Esprit de la forêt du passage. Il est réputé pour sa férocité .... fuis, je t'en supplie, il faut que tu arrives à tes fins ..... »

Depuis des jours que je la fréquentais, je l'avais toujours trouvé très sure d''elle, très vaillante, très décidée. Elle était redoutable à la chasse, et savait se servir d'une multitude d'armes. Elle tuait avec rapidité, sans arrières pensés, guidée par son devoir et sa faim. Aussi en la voyant prise d'une telle terreur, j'hésitais sur la conduite à tenir. Que devais je faire ? L'un des tigres passa une langue énorme sur ses babines, et bailla longuement, découvrant ses énormes crocs, avant de bondir d'un coup. Il était à quelques mètres de nous. Je lâchais Affizza afin de dégainer ma rapière, Elle me bouscula pour s'enfuir, en hurlant, mais se prit le pied dans une des multiples racines qui serpentaient sur le sol eu chût lourdement. Le tigre approchait. Derrière lui, l'autre venait à son tour de bondir dans notre direction. Je me calais à un grand tronc meurtri et rugueux, afin d'assurer ma défense, prête à encaisser le choc du grand félin. J'ajustais ma rapière en affermissant ma prise de sa garde. Affizza s'était relevée et fuyait. Les deux fauves étaient à quelques pas de moi, et me dévisageaient, retroussant parfois leurs babines comme un tic. Ils plaquaient leurs oreilles, ce qui les rendait terrifiant.

C'est ainsi que je devais mourir ? Tuée par deux grands tigres, moi qui n'avait fait autre chose durant toute ma vie, que de respecter les animaux. La vie est une grande farce. Ces idées tournaient dans ma tête, et je crois que je commençais à sentir la peur m'inonder.

Il me fallut longtemps pour comprendre que le tronc auquel j'étais adossée bougeait régulièrement, me donnant des coups avec douceur mais fermeté. Alors que je réalisais, les deux tigres se couchèrent au même moment, comme terrorisés à leur tour, dans un feulement irréel. Je m'écartais du tronc, surveillant les félins, et du coin de l'oeil je regardais derrière moi. Ma panique fut telle que j'en perdis ma rapière. Un immense animal sortait doucement des troncs au sein desquels il s'était dissimulé. Chacune de ses pattes passait pour un tronc énorme, et son corps se noyait dans la pénombre du sous bois, à plus de dix mètres de hauteur. Je n'avais jamais rien vu de tel. Son cri fut entendu à des kilomètres, et ressemblait à un étrange braiment assourdissant. Je tombai sur le sol. Une sorte de long tuyau d'un gris intense s'approcha de moi. Son extrémité était munie de deux doigts mobiles. (Les tigres se retournèrent d'un bond, et fuirent dans les hautes herbes). Il était fixé en amont à une tête énorme, parée de larges oreilles, et je vis deux tout petits yeux rouges qui m'observaient sans cruauté. La longue liane s'empara de moi, et me souleva comme un fétu de paille. Lorsque j'arrivai au niveau de sa tête monstrueuse, je pris pleinement conscience des dimensions colossales de cet animal. Il devait mesurer plus de quinze mètres de haut, son corps était massif et plissé, et il avait deux énormes dents qui partaient à l'horizontale de part et d'autre de sa bouche, que je devinais sous la liane qui m'avait saisie.
Après un long et minutieux examen le mastodonte me reposa à terre. Le choc avec le sol fut brutal, et je tombais par terre.

Alors que je me relevais, les hautes herbes s'ouvrir et j'aperçus le petit homme qui arrivait, marchant péniblement, le souffle court, appuyé sur une longue cane toute noire. Il était sans âge, très pâle, presque diaphane, une longue barbe blanche rebelle et hirsute, un nez fin, des yeux bleus délavés. Il avait les cheveux longs, ramenés en arrière en catogan, blancs, et son visage n'était que rides alambiquées.

Sa voix était caverneuse et puissante, étrangement en désaccord avec ce personnage chétif et bien trop vieux pour faire peur. Debout je le dominais de toute ma taille, et il dû faire un effort pour redresser sa tête, afin de me regarder. Ses bras décharnés étaient tordus par les ans, et il tremblait légèrement de tout son être. Il avait une tunique blanche drapée autour de lui et tenue par une épingle merveilleusement sculptée, représentant un nuage d'argent avec des ailes serties de fines pierres blanches que je ne connaissais pas. J'avisais ma rapière à quelques pas de moi.

–« Ainsi les multiples prophéties disaient justes ! Depuis le temps que je t'attends, je commençais à douter ! Que les Muses me pardonnent ! Je dois te montrer le chemin, ainsi ma vie pourra se terminer, enfin ! Tu n'es qu'une petite sotte, je ne comprends pas comment tu peux détenir tant de pouvoirs, mais à te jauger, tu n'y arriveras sûrement pas ! Qui es tu donc ? »
–« Mes parents m'ont appelée Orphèle, tout comme la Muse par qui nous vinrent les sons, les mélodies et les chants. Je suis née à Shushan, dans le confort douillet d'une grande maison. Mon père est artisan tisserand, il fait les plus belles étoffes de l'Harmonde. Ma mère lui dessine les motifs, qu'il fait exécuter par ses ouvriers. J'ai reçu une éducation stricte, même s'il est vrai que je préférais les cours martiaux à tout le reste. J'ai voyagé avec mon père lorsqu'il voulait vendre ses plus belles créations, je suis allée Sasmiyana, où j'ai vu des bateaux si grands que l'on pourrait y mettre toute votre forêt, Klanpar, la cité des roches, à l'intérieur des Monts Eiglophiens, où il faut chevaucher des aigles pour arriver à son portail, Bokkor et son port, où mon père a perdu un lot de grande valeur, Quaysaria, où il a fallu offrir une merveilleuse cape à une sirène pour qu'elle nous autorise à rejoindre le village des mille tentes, sur la mer Ecarlate, Estezia et son quartier des Arts, Madénie et son port gigantesque, Péloran et son grand hôpital, Ronde cité, cette ville là, nous y allions souvent, car la plupart des robes liturgiques viennent de chez mon père. j'aime beaucoup cette ville et ses sept ports, qui donnent tous vers d'autres destins. et Lorgol, la plus belle ville de l'Harmonde, à moins que ce ne soit Cyniel et ses fabuleux cygnes. J'ai rencontré des tas de gens, côtoyé presque toutes les races de l'Harmonde, et appris beaucoup de choses. Je suis persuadée d'une chose, c'est qu'il faudrait oeuvrer pour que tous les peuples mettent en commun leurs acquis, afin de créer l'Harmonie. Il m'est impensable qu'une seule personne ou qu'un seul pays puisse revendiquer cela, à mon sens, seuls de multiples mélanges parviendront un jour à nous faire retrouver l'ultime perfection, et la mort du Masque par la même occasion. Mes amis aussi en étaient persuadés, et c'est pour cela que nous avons répondu favorablement à la demande de Cupidéa. Elle nous avait persuadé que nous devions trouver la clé des vieux royaumes, retrouver les Anciens, afin de donner une nouvelle chance à l'Harmonde, alors que la guerre est imminente. Rapporter le message, la clé de l'unité, le trésor du carré sacré des Muses ».
–« Tu es cependant si jeune, et tu connais déjà tant de choses, il y a bien longtemps que je n'ai pas été autant impressionné. Tu me plais petite fille, je vais t'aider à mon tour. Evidaar n'est pas mon nom, c'est plutôt celui que l'on m'a donné depuis que je vis dans la forêt du passage. D'ailleurs je ne me souviens plus de mon nom, il y a si longtemps que je ne l'ai plus entendu.... Je vis ici, loin des hommes, loin des mondes, loin de tout, reclus volontaire pour le bien de l'Harmonde. Il y a bien longtemps, un homme de haute stature est venu me voir. J'habitais alors à Lorgol, et je m'occupais à fabriquer des encres de toutes les couleurs. Donc cet homme entra dans mon échoppe et me commanda la totalité de mon stock, qu'il me paya rubis sur l'ongle. Je n'avais jamais imaginé vendre tout cela, et me trouver avec tant d'argent. Il sourit, et me demanda de lui préparer une caisse, dans laquelle je mettrai tous les produits qu'il m'avait acheté, et qu'il reviendrait le lendemain pour prendre le colis. J'ai apporté l'argent à ma femme, et passé la nuit à préparer la caisse et à y ranger précautionneusement mes encres. Fatigué et maladroit, je brisais deux petites bouteilles, dont les contenus se mélangèrent formant une couleur absolument superbe. Fiévreusement j'essayais durant le reste de la nuit de recréer cette nuance qui m'était inconnue. Mais je n'y parvins jamais. A l'aube la porte s'ouvrit, et l'homme entra. Il souriait. J'avais refermé la caisse. Il me regarda et me dit qu'il n'y avait pas toutes les encres qu'il m'avait acheté la veille. Je lui expliquais alors ma mésaventure nocturne. Il sourit de nouveau, et me demanda de lui rendre un service en échange de ces deux encres qu'il m'avait payé et que je ne lui avais pas fournies. J'acceptais sans attendre. Il me demanda de remettre un message et une clé à celle qui viendrait sauver l'Harmonde. Il me demanda de le suivre jusqu'à une petite maison de la rue des moissons. Nous entrâmes dans un long couloir jusqu'à un escalier qui dégringolait vers le dessous de Lorgol. A chaque palier il y avait une porte. Nous descendîmes sept paliers, je me souviens les avoir compter, car j'imaginais avec désespoir avoir à les les remonter. Il ouvrit la porte et j'entrais alors dans une pièce ronde splendidement décorée. Le mur, parfaitement arrondi représentait une forêt luxuriante. Je me souviens encore de mon émotion en entendant les oiseaux qui chantaient. J'oubliais sa présence et m'approcha du mur, j'essayais de toucher les feuilles, et là à ma grande surprise, celles ci bougeaient, j'entrais alors de plein pied dans cette magnifique forêt, et je ne l'ai jamais quittée depuis. J'ai cherché durant des mois le passage, mais je n'ai rien trouvé. J'ai essayé de survivre, puis me suis installé. J'ai continué à fabriquer mes encres, en mêlant nombre de pigments qui n'existent qu'ici. J'ai trouvé de multiples nuances qui auraient fait ma richesse en Lorgol. Puis j'ai rencontré ces deux tigres, ils étaient tout petits. Je l'ai ai élevé, et ils ne m'ont jamais plus quittés. Ils s'occupaient de ceux qui venaient dans le coin, et alimentaient le mythe de l'esprit Evidaar, qui peuple les légendes des gens d'ici. Tu es la seule qui se soit approchée jusqu'ici depuis tant d'années. C'est pourquoi je sais que tu es l'élue. C'est donc à toi que je dois remettre ce sceptre. Je l'ai trouvé il y a bien longtemps au sein de cette forêt sans fins. Il était posé sur une pierre noire, qui portait une inscription que je n'ai pas su traduire. Je n'ai jamais retrouvé cet endroit. J'ai aussi une bourse à te remettre, celle que m'avait donné l'homme, jadis, lorsque je suis entré dans la salle. Peut être qu'il me sera maintenant possible de rejoindre les miens. Suis moi petite. Doucement Malakine, cette enfant ne te connais pas encore. Ne t'effraye pas, Orphèle, Malakine est un mammouth, un des derniers représentants de sa noble race. C'est lui qui te guidera vers ton destin ».
–« J'ai déjà vu un crâne de ces mastodontes au passage de Kamsatra dans les monts Eiglophiens, entre les Communes Princières et les Parages. J'ignorais qu'il restât de tels animaux. Crois tu qu'il puisse voir Affizza ? »
–« Son rôle est terminé, elle rentre à son village, c'est maintenant à son tour d'être à la tête de la tribu des Latifas. Elle fait partie des légendes du clan, elle a aidé l'élue ».
Il marchait doucement, laissant parfois échapper des cris retenus dûs à ses articulations qui le faisaient souffrir. En arrivant près de sa hutte, je me rendis compte que le siège blanc sur lequel il attendait la fin de sa quête, était en fait un énorme crâne de mammouth. Les défenses faisaient office d'accoudoirs, et l'assise avait été taillée à même l'os, qui avait lui-même été finement sculpté. Seul un véritable artiste avait pu faire cette oeuvre, tant étaient fines les incises de l'outil, qui avait véritablement dentelé l'os pour y faire naître une scène bucolique où les habitants de l'Harmonde dansaient une ronde devant un autel somptueux et fumant.
–« J'ai trouvé cela en arrivant, c'est très vieux sans doute, un travail des Anciens très certainement ».

Pour la première fois, il m'était donné de voir un travail effectué par les Anciens. La finesse de l'exécution montrait à quel point l'artiste était passé maître dans sa tâche. Tout n'était qu' harmonie et subtilité. Les branches des arbres semblaient agitées par un vent léger, les danseurs souriaient et il émanait un calme absolu de cette sculpture. Je sentais une émotion grandir en moi, oppressant mon coeur, des larmes glissaient sur mes joues. Je caressais la scène, lentement, mon doigt suivait les contours de la cyse,

Brusquement j'eus une sorte de vision, un grand atelier, des élèves studieux s'appliquant à refaire les gestes précis de leur professeur, quelques coups de maillet, une lame qui rentre dans l'os pour en extraire une oeuvre, une fenêtre ouverte, il fait chaud, le soleil brille littéralement au dehors, irradiant de mille feux, comme si le voile n'existait pas encore. Une rue pavée, des gens pressés, des enfants qui jouent, un vieil homme qui s'apprête à sortir, derrière la ville, au bout de la rue. Il agite un bâton noir devant une obélisque et disparaît. Je reviens dans l'atelier, m'arrête un instant sur chaque visage, essaye de voir le Maître, mais soudain ma vision se brouille, tout devient flou, et je regarde fixement le siège sculpté du vieil homme.
–« Orphèle, ça ne va pas ? »
–« Mais pourquoi criez vous ? »
–« Tu ne réponds plus depuis près d'une heure, que t'est il arrivé ? »
–« Rien, rien, enfin je ne sais pas, j'ai vu une ville, chaleureuse, accueillante, inondée de lumière .... »
–« Tu vois Malakine, je ne suis pas fou ! Elle aussi l'a vu ! »
Le grand pachyderme sembla acquiescer en secouant la tête et en agitant ses larges oreilles.
–« Vous savez de quelle ville il s'agit ? »
–« Hélas non petite fille, mais durant mes années passées à t'attendre, j'ai eu souvent l'impression de voir une ville merveilleuse, emplie de mille et un secrets, certains quartiers sont pavés d'or, du vin coule des fontaines publiques, et sur un tertre il y a une sorte de palais d'or et d'airain. Les femmes sont belles, et parfois je vois des hommes affairés, qui portent des vêtements raffinés, coupés dans les plus belles étoffes aux reflets soyeux et multicolores. Je vois aussi de grandes colonnes noires, qui surgissent parfois de nulle part, restent un instant et disparaissent. A leur place il y a des gens, qui n'étaient pas là avant. Les gens semblent heureux, il n'y a jamais de tristesse, jamais de larmes, chaque vision est une bouffée de joie et de bonheur ouatés, baignant dans un grand équilibre. »

Il sembla hésiter un instant puis entra dans sa hutte. Il en ressortit presque aussitôt, en me tendant un sac de peau.

–« Tiens cela est pour toi ! »
Je regardais ce vieux sac, et le posais devant moi. Quelque chose me retenait de l'ouvrir, une impression, une sorte de réflexe d'autodéfense, une crainte irraisonnée et tenace.
–« Ouvrez le d'abord » m'entendis je dire d'une voix forte.
–« Mais, c'est pour toi, c'est à toi de l'ouvrir ! Ainsi me l'a t on demandé ! »
–« Je ne sais pas expliquer pourquoi, mais je n'ouvrirais pas ce sac , vous pouvez le garder ! »

Le vieil homme souriait.

–« Ainsi c'est donc vrai ! Les vaticinations sont exactes, tu n'es pas guidée par le gain, ni par la haine, tu viens là simplement pour honorer la mémoire de tes compagnons, sans idée de vengeance. Sinon tu n'aurais pas vu la quiétude de la ville, mais un champ de bataille, et tu te serais jetée sur le sac, mais non, rien de tout cela, je t'admire beaucoup Orphèle, et pour la première fois je me dis que nous, pauvre peuple de l'Harmonde, avons une vraie chance de vaincre le Masque, je suis si heureux, permets moi de t'embrasser ! »

Joignant le geste à la parole, il m'enlaça et m'embrassa paternellement. Puis il ouvrit le sac, libérant un serpent multicolore, qui s'enfuit dans les herbes. Je reconnu ce serpent, Affizza m'avait mise en garde contre ce reptile au poison mortel et fulgurant. Il retourna dans sa hutte, et en ressortit avec un autre sac en cuir qu'il me tendit.

Je l'ouvris avec délicatesse, il renfermait un plan plié, sans doute d'une bâtisse aux multiples pièces, coursives et passerelles. Quelques symboles étaient disposés de part et d'autre du plan, je ne les identifiai pas. Il y avait aussi une bourse et une chandelle à demie consumée. J'ouvris la bourse avec précaution. Elle renfermait un petit éclat de métal bleuté, enveloppé dans une morceau d'étoffe duveteux, et une pièce de monnaie que je ne connaissais pas. La chandelle quant à elle n'avait rien d'extraordinaire.


–« Voilà les clés, il te faudra savoir en faire bon usage. Je te permets de dormir ici, et à l'aube, tu partiras avec Malakine, il t'emmènera au cimetière, et j'éspère que tu sauras trouver la porte ! »
–« Au cimetière ? »
–« Oui, c'est là qu'il te faudra aller, mais reprends des forces, Orphèle, ne crains rien, ce soir nous allons veiller sur toi ! »

[A SUIVRE]

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