Lozio prétexta la fatigue pour ne pas retourner au château. Dès le début de la soirée, de nombreux paysans qui s'étaient joints au cortège fêtèrent l'événement et ne prêtèrent aucune attention au couple enlacé que la nuit avait happé.

Assis en tailleur, les deux amants étaient séparés par le coffret en argent dont Lozio avait tenu le couvercle légèrement entrouvert depuis le milieu de J'après midi. A présent, le Zéphir qui avait rempli son rôle durant de longues années s'ébrouait en petites étincelles de glace et s'apprêtait à remonter le fil de la rivière vers les montagnes. Une odeur nauséabonde s'échappait désormais du coffret. Avec une grimace de dégoût qui fit rire Soé, le sorcier attrapa du bout de sa dague le cadeau de son père.

Un sexe...

Encorné par un cerf, le duc avait bel et bien confié ses attributs virils au sorcier en espérant un miracle qui n'avait jamais eu lieu. Avisé et enclin à croire aux talents de son fils, le père de Lozio avait protégé le sexe de son maître des effets du temps en l'enfermant soigneusement sous la garde d'un Zéphir. A cette époque, le sorcier n'envisageait pas que son fils puisse ainsi mettre à profit le précieux organe. Il espérait seulement qu'un jour Lozio découvre un enchantement capable de redonner au duc sa fierté d'antan et devienne, par là même, son favori.

Le froid avait conservé le sexe ducal jusqu'à ce jour, jusqu'à ce que Lozio laisse à la putréfaction le soin de faire son oeuvre afin de porter les frontières galidéennes jusqu'au ruisseau de Soé.

Les yeux emplis d'amour, les deux amants s'embrassèrent au-dessus du morceau de chair et, le sourire aux lèvres, le jetèrent dans les eaux claires du ruisseau.