Genèse

  

L’AUBE DES TEMPS
 
Aux premiers temps, régnait le néant. 
Et du néant surgirent les quatre Muses ...
Elles se nommèrent Orphèle, Cysèle, Nuence et Stance . Eternelles, elles n’avaient d’autre raison d’être que de créer. Elles se lancèrent alors dans la composition d'une œuvre d’art parfaite et absolue, qui naîtrait de leur union : elles bâtirent un monde.
Cysèle en sculpta les reliefs et les êtres,
Nuence en créa les couleurs et leurs infinies variations de lumière,
Orphèle insuffla la musique et les sons sur la terre comme dans l’air,
Stance engendra le mouvement et face au spectacle, lui donna une histoire en déroulant le temps.
Leur ballet se nommait l’Harmonie.

Les Muses descendirent sur leur terre arrachée au néant et, dans leur sillage, donnèrent la vie à des êtres mythiques qui devinrent leurs escortes. Dragons, Hydres, Titans, Cyclopes, Tarasques, Phénix, Sphinx… ces puissantes créatures qui leur prêtèrent allégeance furent nommées Excellences. Contemplant la beauté de leur œuvre, elles lui donnèrent enfin le nom d’Harmonde.

Mais les Muses sentaient leur création incomplète. Tant de beauté et d’harmonie devaient être sublimées par une ultime perfection qui naitrait d’une union supérieure : leur fusion.
Avant d’exécuter le rituel, chacune partit en quête des plus grandes beautés de l’Harmonde pour y puiser l’inspiration. De leur voyage naquirent des êtres mythiques sur les endroits de leurs haltes : les Merveilles. Centaures, Pégases, Nymphes, Dryades, Salamandres, Trolls, Harpie, Sirènes, Ondins… Elle devinrent les gardiennes des Perfections, les lieux enchantés où les Muses s’étaient reposées.

C’est après avoir réuni les splendeurs de l’Harmonde que les Muses entamèrent enfin le rituel. Contrairement à leurs attentes, il ne se solda pas par une fusion mais engendra une cinquième Muse disposant des talents des quatre premières. Cet Eternel fut le résultat du rituel de l’Ultime Perfection.
Découvrant l’Harmonde immuable et parfait qu’avaient bâti ses mères, il y apporta la dernière touche qui en ferait une œuvre d’art absolue : le changement.
Puissant et manipulateur, l’Harmonde apparut à ses yeux comme un théâtre, et ses acteurs des pantins. Il donna alors naissance au Drame et devint le Masque .
 
 

 
 
LE ZENITH

Afin de donner naissance au paradoxe qui organiserait le Drame, le Masque enfanta le jour et la nuit en créant ses propres Eternels. Lorsque le soleil apparut et atteignit son zénith, naquit Diurne , Eternel du Jour, dont les enfants, les Lueurs , se répandirent aussitôt sur l’Harmonde.
Le soleil déclina ensuite et les ombres apparurent : Noxe naquit. Les ombres se répandirent sous terre et créèrent leur propre territoire, creusant le sol de leur noirceur insondable : les Abysses .
Le Masque, attiré par le pouvoir dissimulateur des ombres, séduisit Noxe, si bien qu’elle en changea de visage et devint L’Ombre .
Ensemble, ils enfantèrent la Ténèbre, essence des créatures nocturnes. De cette matière naquirent les démons , et l’Ombre devint leur seigneur.

Pour véhiculer son Drame, le Masque créa des êtres intelligents mais manipulables, des mortels qui sauraient s’adapter aux changements perpétuels qu’impliquait sa vision.
Il parcourut l’Harmonde et créa les humains , innombrables. Quand les Muses discernèrent les intentions du Masque, elles le prirent en méfiance et s’éloignèrent de lui. Le Drame allait corrompre l’œuvre qu’elles chérissaient tant. Inquiètes, elles unirent leurs forces pour créer un Eternel qui pourrait lui tenir tête et veiller à la persistance de leur œuvre : Janus .
Blessé dans son orgueil, le Masque rejeta la défection de ses mères et, dissimulateur, il garda secrets ses projets.

La mission de Janus était de réguler l’Harmonde par son pouvoir immense, celui des Sentences . Il devait surveiller l’Harmonde ainsi que les êtres, éternels ou mortels, qui le peuplaient. Il s’opposa ainsi au Masque, en régulateur face à l’agitateur.

La première de ses Sentences fut d’organiser l’écoulement du temps. Il l’aménagea en douze Décans, qui formeraient une année.
L’Harmonde entra alors en résonance avec ce nouveau phénomène et éveilla les saisons qui enfantèrent les quatre Dames de l’Eté, du Printemps, de l’Automne et de l’Hiver. Quatre nouveaux Eternels, libres et merveilleux qui vagabondèrent sur l’Harmonde, lui insufflant leur saison au gré de leur passage.
 
Les Dames donnèrent elles-mêmes naissance à de nouveaux mortels : les saisonins . Trois espèces par saison furent crées. Pour décider quelle saison régnerait sur l’Harmonde, les saisonins s’affrontèrent et initièrent la guerre des Décans. Cette partie de l’histoire se trouve résumée dans le chapitre Petite histoire des saisons.

La guerre des Décans, bien que destructrice, permit la création d’un accord : le Pacte des Saisons où chacune d’entre elles promit de régner sur ses propres enfants à des endroits précis de l’Harmonde. L’Automne fut désignée comme perdante de la guerre pour avoir enfreint les règles que les Dames s’étaient fixées et la plupart de ses enfants quittèrent l’Harmonde en suivant leur Dame sur l’archipel des perdants, qui devint l’île de l’Automne. La guerre terminée, les autres saisonins se retirèrent dans leurs écrins et les Dames rejoignirent leurs retraites en quittant le devant de la scène. Elles laissèrent la place aux humains qui, sous l’influence du Masque, se répandaient sur l’Harmonde et fondaient les premières sociétés.

 
 
 
 
L’AGONIE

Attentives aux actions du Masque, les Muses réalisèrent que sa puissance devenait menaçante et ses serviteurs trop nombreux. En plus des humains, le Masque disposait maintenant de légions de démons depuis sa connivence avec l’Ombre...
Les Muses demandèrent à Janus de constater le déséquilibre et obtinrent le droit de s’allier à Diurne pour profiter de son bras armé, les Lueurs.  Fasciné depuis toujours par la flamboyance des Muses, il accepta sans hésiter.
C’est alors qu’elles prirent une décision qui changea l’Harmonde à jamais : de créatrices, les Muses devinrent actrices. Leur but ne fut plus l’Harmonie, mais la maîtrise du lien qui unissait mortels et Eternels sur l’Harmonde. Leur œuvre devint un échiquier et les vivants en devinrent les pièces.
Voyant la partie commencer, le Masque réagit violemment et embrasa l’Harmonde de sa rage ; ce fut la guerre des Eternels. Humains et démons s’opposèrent aux Lueurs et aux Excellences dans une violence inouïe qui balafra à jamais le visage de l’Harmonde. Janus, fidèle au rôle qu’il avait toujours eu, se plaça en arbitre. L’Agonie venait de commencer.

Le Masque et l’Ombre prirent le dessus sur les Muses et sur Diurne. Réalisant qu’elles ne pourraient perdurer en ce monde, elles choisirent d’utiliser leurs dernières forces dans un nouveau rituel : celui de l’Inspiration.
Pour cela, elles durent trahir Diurne en le vidant de son énergie, afin qu’il devienne le réceptacle et le vecteur du pouvoir de l’Inspiration. Il fut fractionné en des milliers de Flammes dans lesquelles elles mirent une part d’elles-mêmes grâce au rituel entrepris. Elles disparurent ensuite à jamais et, depuis, nul ne sait ce qu’il advint des quatre créatrices. La libération des Flammes provoqua une explosion sans précédent qui fit naître le Centresprit, lieu spirituel et parallèle à l’Harmonde, d’où les Flammes jaillirent pour rejoindre chaque humain. Un cycle se mit en place : les Flammes quitteraient les humains à leur mort pour rejoindre le Centresprit où elles se réincarneraient dans les cœurs des nouveaux-nés. Devenus Inspirés , les humains furent libérés de la domination du Masque et passèrent dans le camp des Muses...
Le Masque perdit ses pions et prit la fuite sur l’archipel des perdants (L’île de l’automne), où était déjà partie la Dame de l’Automne avec beaucoup de ses enfants. L’Ombre fut terrassée par ce brasier jaillit du Centresprit et ses démons retournèrent se réfugier aux Abysses.
Le sacrifice de Diurne et des Muses mit ainsi fin à la guerre. Les filles du jour, les Lueurs, qui avaient déjà payé un lourd tribut sur les champs de bataille, quittèrent l’Harmonde sous la protection de Janus, pour que soient préservées les dernières d’entre elles.
Ce fut alors la Flamboyance.

 
 
 
 
LA FLAMBOYANCE

Les 3000 ans qui suivirent furent une période gloirieuse pour l’Harmonde, alors que le cycle initié par le Centresprit continuait d’Inspirer les humains. Leur population augmenta et, quand apparut un décalage entre les naissances et le nombre de Flammes, les humains naquirent parfois ternes, c'est-à-dire sans Flamme. Mais l’Inspiration leur profitait malgré tout grâce aux sociétés fabuleuses qu’elle permettait de bâtir. Trois millénaires durant, les humains créèrent de puissantes œuvres magiques et érigèrent des lieux fabuleux (appelés aujourd’hui Vestiges). Des héros légendaires et des artistes d’exception apparurent et, sublimant leur Flamme, certains devinrent des Génies .
Après la disparition des Muses, la fuite du Masque, le sacrifice de Diurne et la retraite des Dames, le seul Eternel encore présent était Janus. D’une Sentence, il exila l’Ombre aux Abysses, lui interdisant de sortir. Diurne, affaibli, éparpillé, réduit au corps d’un enfant, fut enfermé dans une orbe pour survivre.
 
 
 
 

L’ECLIPSE

Mais le Masque, préparait sa vengeance.
Sur l’île où il s’était retiré, il rencontra la Dame de l’Automne qu’il entreprit de séduire des siècles durant. Il lui promit le pouvoir et en fit sa promise. Quand la Dame accepta enfin son alliance et lui confia le destin de ses enfants restés seuls sur l’Harmonde, le Pacte des Saisons fut rompu, ce qui provoqua un déséquilibre majeur qui affecta tout l’Harmonde. Ce fut l’Eclipse.
Nul ne se souvient aujourd’hui de ce qu’il advint exactement lors de l’Eclipse, mais la légende rapporte que, quand la Dame revêtit le voile que le Masque lui offrit  pour symboliser leur union, celui-ci se répandit au-dessus de l’Harmonde et voila le Centresprit, coupant le lien entre les hommes et les Flammes. Le cycle de leur réincarnation fut rompu.

Les conséquences, parfois mystérieuses, de cette rupture furent nombreuses :
- Les Flammes en en vol vers le Centresprit se scindèrent et créèrent les Danseurs qui permettraient plus tard la pratique de l’emprise .
- Les Génies, incapables de rejoindre le Centresprit, furent condamnés à errer sur l’Harmonde.
- La magie créatrice des Muses qui parcourait l’Harmonde vit ses sources de pouvoir balayées et se cristallisa sous la forme de l’Eclat.
- L’horizon « disparut » et, depuis, aucun navire qui se rendit au-delà n’en revint.
- Il devint impossible de peindre de nouveaux Tableaux-mondes et l’art du Décorum périclita.
- Les Flammes ne pouvant se réincarner, les ternes devinrent de plus en plus nombreux et le Masque revint sur l’Harmonde, récupérant ses pions l’un après l’autre…

L’Harmonde fut à jamais bouleversé, les civilisations humaines régressèrent, même quelques saisonins y perdirent certains de leurs dons. Rendus fous par la perte de leurs pouvoirs, de nombreux mortels cherchèrent un moyen de substitution pour perpétuer leur puissance. Beaucoup se tournèrent vers l’Ombre. La conjuration, qui permet de contourner la Sentence de Janus enfermant les démons aux Abysses, fut alors créée.

 
 
 

LE CREPUSCULE
 
Le sacrifice de Diurne ne laissa pas assez de puissance au jour pour perdurer. C’est depuis que l’aube règne sur l’Harmonde jusqu’à midi, que le soleil y trône au zénith trois heures à peine et que le crépuscule s’y installe ensuite jusqu’au soir. Un automne en demie teinte semble l’avoir avalé, en transformant la saison des feuilles mortes et ses enfants en une malédiction aux yeux de tous les mortels.
Les Flammes disparaissaient peu à peu, emportant avec elles les dernières traces des Muses... le Masque gagnait ainsi sa bataille. L’âge des Crépusculaires commençait.

Janus, alarmé, chercha un moyen pour maintenir un semblant d’équilibre. Il retrouva les trois autres Dames des saisons et leur proposa un pacte afin de rétablir le lien avec le Centresprit.
Pour sauver les Flammes des derniers Inspirés, il fonda le Conseil des Décans en désignant neuf saisonins, un par saison excepté l’Automne, qui seraient chargés de récupérer les Flammes des mourants pour les transmettre aux Elus qu’il désignerait.
Les Dames acceptèrent d’aider Janus et l’année fut partagée : trois décans (1 décan = 1 moi) pour l’Eté, trois pour l’Hiver, trois pour le printemps et un seul pour l’Automne maudite. Ainsi les déséquilibres entre saisons ne pourraient plus advenir.
En échange, les Dames demandèrent à Janus que l’Inspiration devienne accessible aux saisonins, pour qu’ils se protègent eux aussi du Masque.
Le pacte fut scellé.
Les Dames se cachèrent ensuite dans des Tableaux-mondes, de peur d’être, comme leur sœur, séduites par le Masque. Nul saisonin ne les revit et nombreux sont ceux qui cherchent encore aujourd’hui à les retrouver.

L’Inspiration moderne naquit donc sous l’égide du Conseil des Décans, guidée par Janus. Pour sauvegarder le souvenir moribond des Muses, une guerre secrète, qui se perpétue encore de nos jours, débuta alors pour endiguer la victoire imminente du Masque sur l’Harmonde et préserver l’équilibre, l'Harmonie originelle.

L’Histoire rapporte ensuite que le Masque, qui n’avait rien perdu de ses ambitions, retrouva Diurne pour se venger de son antique trahison. Une ancienne légende raconte qu’il lança un poignard dans un puits contenant l’Orbe qui emprisonnait son fils rebelle, pour le détruire à jamais. Une alchimie se produit : l’Orbe éclata et la puissance déchue de l’Eternel pénétra au fond du puits pour rejoindre les Abysses. Naquit alors un arbre noir, gorgé de Ténèbre et animé par l’essence de Diurne, sous les branches duquel le temps ne passerait plus et où aucun Eternel ne pourrait plus utiliser ses pouvoirs. Il fut nommé Souffre-Jour.
Y voyant une œuvre unissant les Eternels du Jour et de la Nuit, Janus y cacha ce qu’il restait de Diurne à la tête d’un collège destiné à former ses espions : les Eminences Grises. Ils seraient les oreilles, les yeux et la voix de Janus et lui offriraient les informations nécessaires au maintien de l’ordre établi. Viendrait par la suite la création de nouveaux collèges, lorsque l’héritier de Diurne se présenterait pour sauvegarder son essence. Cet héritier se nommait Agone de Rochronde. C’était il y a cinquante ans...

Aujourd’hui, le Masque complote toujours pour faire disparaitre les dernières Flammes et la légende veut qu’il en reste 1001. Les rares héritiers des Muses se battent avec l’espoir d’un monde libre de la corruption du Masque, en lui livrant une guerre secrète dont l’enjeu est de choisir entre la Flamboyance ou la Nuit Eternelle…

 
 
 
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La Gazette du satyre Alraune

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Il était temps ! (haha !)

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